Pages : Précédent 1 … 6 7 8
LE MEURTRE DE L'HOMMONDE
Le final de la campagne solo Millevaux / Trilogie de la Crasse par Damien Lagauzère ! Une série de meurtres rituels commis dans différentes réalités va mener l’enquête de Black Rain jusqu’à -presque- résoudre un mystère concernant les dangereux portails qui résident entre les mondes.
(temps de lecture : 38 min)
Joué le 10/07/2019
Le jeu principal de cette séance : Psychomeurtre, par Thomas Munier, les meilleurs des profilers contre les pires des serial killers
Cette partie a été jouée surtout avec Perfect, Cold City, Psychomeurtre et Grey Cells. il y a aussi des bouts de Millevaux (Bois-Saule) et Silent Hill et quelques Vertiges Logiques
Avertissement : contenu sensible (détail après l’illustration)
ghoguma film, cc-by
Contenu sensible : viol, zoophilie
Parties précédentes de la campagne Millevaux / Trilogie de la Crasse :
1. [La Trilogie de la Crasse] La Reine de la Crasse
Première partie d’une nouvelle campagne Millevaux solo-multisystèmes, en crossover avec la mythologie de la Trilogie de la Crasse et la ville crapoteuse et hallucinée de Mertvecgorod née sous la plume de Christophe Siébert. Où un simple exécutant s’entiche pour la victime qu’il doit convoyer et tente l’impossible pour la retrouver.
2. [S’échapper des Faubourgs] Tuer Précieuse
Une incursion dans un sous-monde où à la fois l’univers de Cœlacanthes et le thème des femmes au destin tragique envahissent tout.
3. [Grey Cells] Le coût d’entrée
L’agent-mouche décide de partir dans Millevaux pour sauver le monde même si tout le monde s’en fout… et quoi que ça puisse lui coûter.
4. [La Trilogie de la Crasse] La poubelle du multivers
Désavoué, l’agent-mouche Haze se la joue en solo et part en enquête à l’aveuglette dans les recoins les plus sordides du multivers, où Millevaux progresse toujours plus.
5. La porte de la ruine
Alors que Millevaux a envahi Mertvecgorod, Haze se retrouve baby-sitter d’une femme qui s’avère être une porte entre les mondes… 5ème épisode de la campagne solo multisystèmes Millevaux / Trilogie de la Crasse par Damien Lagauzère. (temps de lecture : 12 min)
6. [Remember Tomorrow] Safe orbit
Quand Millevaux a colonisé toute la planète, une station orbitale aseptisée semble être le refuge idéal… ou pas. Ça vous tente, un saut dans le futur ?
(un épisode joué sans Millevaux avant ce final, à retrouver ici : Épisode 10, joué avec Back to the Beginning et Queen Killer)
L’histoire :
Berlin, le 29 avril 1952. Il est 20h35. Une pluie fine tombe sur ce qui reste de la Flaktürme de Friedrichshain. Une Pluie Noire, dans le secteur des Rouges. Le début de l'Entropie. Le début de la Fin.
La victime est un homme entre 50 et 70 ans. À vue de nez, je dirai autour de la soixantaine. Il a les yeux crevé, le nez et les oreilles arrachées. Il baigne dans son sang. Son pantalon et son slip sont baissés jusqu'aux chevilles. Il y a le cadavre d'un porc à côté. Les agents de la RPA ne le savant pas encore mais la victime a été violé par ce porc. Les agents de la RPA ne le savent pas non plus mais, pour chaque meurtre, il y a un témoin. Je dois le trouver.
Je m'appelle Corso. Je travaille comme médecin légiste pour une organisation nommée Black Rain dont le principal boulot consiste à recueillir un maximum d'informations sur les meurtres comme celui-ci, sur le meurtre métaphysique, sur le meurtre de l'Hommonde. J'ai été envoyé dans le Berlin de ce monde pour intégrer en toute discrétion l'agence internationale connue sous l'acronyme de RPA (Reserve Police Agency). La mission officielle de la RPA ? On s'en fiche un peu. Sa véritable mission consiste à nettoyer Berlin des Horreurs qu'ils ont invoquées pendant la guerre. Ici, dans ce Berlin, les recherches occultes menées par les nazis étaient sérieuses. Ils ont ouvert des portes vers d'autres mondes et des choses vraiment dégueulasses en ont profité pour venir nous dire bonjour. Mais quand les nazis ont dû fuir ou ont été arrêtés, ces trucs là sont restés. En réalité, selon la RPA, il y a trois types d'Horreurs : celles qui ont été invoquées et viennent d'un autre monde ; les mutants, tristes résultats des expériences nazies et les ST (Spezialeinsatztruppen) soit les soldats morts-vivants de l'armée allemande. Et toutes ces joyeusetés hantent toujours les ruines de Berlin. Les chefs de la RPA pensent que c'est une de ces choses qui a tué cet homme. Mais ils se trompent.
Black Rain a bien fait les choses. J'ai ici la double casquette de légiste mais aussi d'ancien militaire qui me permet de justifier d'un grade et commander les agents de base. Aussi, je leur donne quelques consignes afin, surtout, d'avoir le champ libre sur la scène de crime. Par définition, je connais déjà cette scène de crime. Elles sont toutes pareilles. Mais je cherche... le truc en plus, ce truc dont je ne peux dévoiler l'existence à mes collègues de la RPA.
Le tueur a utilisé un couteau de boucher. Mais on a aussi trouvé des traces d'explosif à proximité. Est-ce que le tueur avait prévu de s'en servir ? A-t-il été dérangé ? Ces explosifs lui appartiennent-ils vraiment ? Je fais le tour de la scène de crime. Je repère des empreintes de pas dans la boue. Il est facile de tendre une embuscade dans ces ruines. Si c'est le cas, cela peut signifier que le tueur connaissait la victime. Il avait dû la repérer, repérer ses allers et venues. Son acte est prémédité, évidemment. La victime ne connaissait pas forcément le tueur. En tout cas,il semblerait qu'elle ait eu quelques habitudes qui ont permis au tueur de voir en elle la cible idéale. À moi, donc, de retracer non seulement le portrait du tueur mais aussi celui de la victime. Peut-être que je trouverais là aussi des informations utiles.
Et je me pose cette question, ce crime a un sens énorme pour moi car je suis un agent de Black Rain mais en a-t-il autant pour le tueur ? Sait-il vraiment ce qu'il a fait ? Sait-il vraiment qu'il a reproduit là meurtre de l'Hommonde, précipitant ainsi sa réalité dans l'Entropie ? Va-t-il recommencer ? Je cherche un indice, un indice à double sens. Je veux un indice qui me permette d'envoyer les agents de la RPA, mes hommes, sur une véritable piste. Mais je veux aussi un indice qui ait du sens quant au meurtre métaphysique.
Et dans un coin, dans l'ombre, je trouve des restes de nourriture. Le tueur devait donc bien être en planque ici et depuis un moment. Il connaissait donc bien les habitudes de sa victime. Mais peut-être savait-il aussi que l'attente durerait un moment. Pourquoi ? Est-ce que quelqu'un l'aurait repéré s'il était venu se cacher plus tard ? En tout cas,il est prudent et prévoyant. Selon la catégorisation traditionnelle, je crois pouvoir dire que j'ai à faire à un tueur organisé.
Je me relève. J'appelle mes gars pour qu'ils jettent un œil à ses restes de nourriture. Je commence à donner des consignes pour que tout ça, et le corps, soient évacués et ramené au siège de la RPA. Je compte bien autopsier le corps moi-même. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai l'impression que ce tueur-là ne s'est peut-être pas borné à reproduire le meurtre de l'Hommonde. J'ai le pressentiment qu'il a voulu y ajouter sa touche personnelle. Je dois la trouver. Et alors que je me relève,je vois comme une ondulation dans l'air, des vaguelettes verticales, un mouvement régulier. On dirait un voile invisible. J'avance la main et la vois traverser ce voile invisible. J'ai la nausée. Je suis pris d'un Vertige... Logique...
Avec toutes ces conneries de changements d'univers, de Multivers et de voyage dans le temps, je ne sais plus ce qui est vraiment arrivé, si c'est vraiment arrivé et où et quand c'est peut-être arrivé. Mais ce que je sais, c'est qu'il y a au moins un lieu et un moment où Haze a tué la Reine. Mais comme je ne sais pas quand il l'a réellement tuée, je ne sais pas si mes souvenirs d'elle sont réels. S'agit-il de souvenirs,de fantasmes, de rêves ? En vérité je n'en sais rien. Selon le moment où Haze l'a tuée, il est possible que je ne l'ai jamais rencontrée. Je ne l'aurais donc vu que sur un écran d'ordinateur. Non ! Pour ça, il aurait fallu que je traîne sur des sites dégoûtants et c'est pas mon genre. Et... et... on ne peut pas vraiment dire que la WIFI fonctionne très bien à Berlin en 52. Alors, d'où me viennent ces souvenirs, ces visions d'elle ? Je ne sais pas si ces images dans ma tête sont réelles mais je sais que la Reine, finalement, je tenais à elle.
Jeudi 4 juillet 2019. Le ciel est bleu. Il est 10h47 du matin et je m'apprête à procéder à l'autopsie de cet homme dont on a toujours pas trouvé l'identité. Je mets un peu de gel sous mon nez ; le corps commence à sentir mauvais. Il fait frais et je remercie l'inventeur du climatiseur. Ici, à Los Angeles, à cette heure de la journée et en cette saison, le soleil tape déjà fort.
Je suis déjà au parfum, c'est le cas de le dire, d'une partie des éléments que je vais trouver. Personne ici, au siège du LAPD, ne le sait mais ce meurtre est une reproduction du meurtre de l'Hommonde et comme bien des victimes dans bien d'autres univers parallèles cet homme proche de la soixantaine a été retrouvé...
...à Berlin en 1952, les yeux crevé, le nez et les oreilles arrachés, baignant dans son sang. Son pantalon et son slip étaient baissés jusqu'aux chevilles. Il avait de plus été violé par le porc dont on avait retrouvé le cadavre sur la scène de crime.
Comme prévu, je trouve sur le corps de la victime des traces de phéromone de truie ; celles qui ont servi à « motiver » le porc. Les blessures ont été effectuées à l'aide d'un couteau de chasse ou de boucher. Je prends les mesures de chaque plaie afin d'essayer de déterminer la taille de l'arme et, peut-être, son modèle. Cela me permettra par la suite également, en fonction de l'angle, d’évaluer la taille du tueur par rapport à sa victime. Dès à présent, je peux dire que le tueur est plus petit. Mais la victime était un homme de grande taille. Aussi, je peux en déduire que le tueur est un homme de taille moyenne qui a certainement frappé plusieurs fois la victime afin de la faire tomber. Ensuite seulement il s'est acharné sur le visage. Puis, alors que la victime était toujours vivante mais plus en état de se défendre, le tueur a fait venir le porc.
Sachant que les coups ont été portés par un homme de taille moyenne à l'aide d'un couteau de chasse ou de boucher, la profondeur des plaies me permet aussi de déterminer la force mise en jeu par le tueur. Or, il apparaît que les plaies sont moins profondes que je ne m'y attendais. Il semblerait donc que le tueur n'a pas cédé à quelque pulsion sauvage. Il aurait même plutôt tenté d'être... efficace. Je retrouve là l'esquisse d'un tueur organisé. L'homme sait ce qu'il fait.
Je cherche sous les ongles de la victime d'éventuelles traces de cheveux ou de poils. Pour son âge, cet homme était plutôt vaillant et bien portant. Il a certainement tenté de se défendre. Rien ! Soit la victime a été à ce point prise au dépourvu qu'elle n'a pas pu se défendre, soit le tueur a bien pris soin d'effacer toute trace. Ce dernier point apporterait de l'eau au moulin de la piste d'un tueur organisé. Mais, si celui-ci sélectionne effectivement sa proie, il aurait pu choisir une victime plus « facile ». je pense qu'il a choisi cet homme en fonction de ses habitudes et de ce trajet qui le faisait passer près d'un lieu propice à une embuscade mais est-ce vraiment l'unique critère ? Je reste de plus convaincu que ce tueur métaphysique se différencie des autres. Lui, il ne cherche pas seulement à reproduire le meurtre de l'Hommonde. Il veut poser sa marque, sa signature. Il pense qu'il vaut mieux que ça, mieux que les autres. Il n'est pas une marionnette du destin et il veut le montrer à tous. C'est pour ça que je suis convaincu qu'il va recommencer. Mais pour en être sûr, je dois trouver cette signature. Et celle-ci se trouve quelque part sur ou dans ce corps.
Je prends un peu de recul. À tout hasard, je cherche à voir si toutes ou certaines des plaies forment un motif. Merde ! C'est bien le cas ! Et ce motif c'est... la rune Hshl ! Ce type n'a pas frappé qu'au hasard. Il a reproduit sur le dos de la victime le motif d'une rune Hshl. Comment connaît-il ce symbole ? Est-ce un ancien agent de Black Rain ? Normalement, seules les Mouches peuvent percevoir la présence de ce motif qui indique l'existence d'un passage entre plusieurs mondes. Les Mouches peuvent alors emprunter ce passage. Moi, c'est un peu différent. J'utilise un jeu de runes pour accéder à la dimension du Voyeur. De là , je peux espionner les autres mondes et m'y rendre. Mais bon, bref... Normalement, la rune préexiste. On ne dessine pas une rune Hshl pour créer un passage. On la trouve puis on trouve le passage.
Je continues à pratiquer l'autopsie en mode automatique. Je pense à autre chose. Je me demande ce que cherche à prouver le tueur avec cette marque. Est-ce vraiment un ancien agent de Black Rain ? S'agit-il seulement d'un ennemi, de quelqu'un qui aurait eu vent de l'existence de notre organisation et qui voudrait nous... provoquer ? Est-ce un apprenti sorcier qui pense pouvoir ouvrir un portail vers un autre monde ? Si c'est le cas, le pauvre type n'a rien compris. En tout cas, je revois mon jugement le concernant. Je pensais au départ à une sorte d' « artiste » voulant montrer sa supériorité. Je pense maintenant qu'il en sait plus que je le soupçonnais. Et s'il pensait profiter du fait d'être l'instrument du destin dans cette reproduction du meurtre de l'Hommonde pour en retirer quelque chose pour son propre compte ?
Je repense aux 7 archétypes, stigmates et mobiles recensés par Black Rain. Mon tueur pourrait donc bien être un tueur en série. Quant au mobile, peut-être est-il inspiré par une sorte de rituel satanique ou de délire schizophrénique. Il s'agit peut-être d'un toxicomane. Les deux peuvent aller ensemble. Cela ne me dit pas comment il a eu connaissance de l'existence de la rune mais il est fort probable que je me trouve effectivement face à un tueur en série organisé en proie à un délire de type « satanique », ou en tout cas occulte, dû à une pathologie mentale et/ou la consommation de stupéfiants. L'homme est visiblement de taille et de corpulence moyenne, je peux donc éliminer celui des stigmates concernant justement sa taille et son poids excessifs, dans un sens comme dans l'autre.
Je termine l'autopsie, recouds le corps et le rend aussi présentable que possible. Je nettoie et range mes outils. Je m'occupe de la paperasse et m'apprête à remettre mon rapport à l'inspecteur chargé de l'enquête. J'en ai également fait une copie pour les dossiers de Black Rain.
Qu'est-ce qui s'est passé ici ? Il y a eu un dégât des eaux. Les murs suintent. Les plaques au plafond sont molles à cause de l'humidité. J'attire l'attention d'un agent en uniforme passant par là et lui demande ce qui s'est passé. Il éclate de rire et poursuit son chemin. Il me prend pour un rigolo, un blagueur. Je ne comprends pas. Je remonte jusqu'au rez-de-chaussé. Pareil ! Je touche le papier peint et celui se décolle en partie à cause de l'humidité ambiante. J'interroge là encore les agents au comptoir de l'accueil. Ils me regardent puis se regardent, dubitatifs. Ils ne disent rien mais n'en pensent pas moins. L'un d'eux tend la main dans ma direction et me demande si je veux qu'il remette le rapport à la personne concernée. Je lui tends le dossier et quitte le commissariat.
Dehors, la rue est déserte. On y voit pas à 10 mètres à cause du brouillard. Il n'y a pas un bruit. Je fais quelques pas et me retourne. Je fais face au commissariat de Silent Hill. Je fais de nouveaux quelques pas mais, finalement, renonce à entrer dans le bâtiment.
J'erre au hasard dans les rues de... Silent Hill. Il fait gris. Je n'y vois rien. Il n'y a pas un bruit. Par moment, j'ai l'impression d'apercevoir des ombres au loin mais je n'ose pas m'approcher ni appeler. Au bout d'un moment, je me retrouve dans une ruelle. Là , sur un tas d'ordure, le corps d'un homme qui doit avoir entre 50 et 70 ans. Il a les yeux crevé, le nez et les oreilles arrachés. Il baigne dans son sang. Son pantalon et son slip sont baissés jusqu'aux chevilles. Il y a le cadavre d'un porc à côté.
Tout est là  ! Même le porc ! La rue est vide, évidemment. Pourtant, dans ce monde là aussi il doit forcément y avoir un témoin. Silent Hill, comme ai-je atterri là  ? On dirait une ville abandonnée, une ville fantôme. Aussi, je ne m'attends pas à tomber sur des flics et ne me préoccupe pas de pourrir la scène de crime. Je retourne le cadavre. Je cherche et je trouve la rune Hshl représentée à coups d'entailles dans le dos. La rune indique la présence d'un passage. Je n'ai trouvé aucune trace du témoin à Berlin. Est-il possible que, bien que ce soit plus qu'improbable, cette rune indique aussi un passage qu'aurait pu emprunter le témoin ou le tueur ? Je fouille au hasard. Évidemment, je ne trouve rien. Soudain, une sirène retentit. Tout se met à tourner autour de moi. Le sol devient liquide et s'écoule à travers le grillage constituant maintenant la chaussée. Les murs déjà décrépis s'effondrent par plaques et laissent la place à de la tôle rouillée. Les cadavres de la victime et du porc sont toujours là .
Cet homme n'est pas celui de Berlin. Je le fouille. Je ne trouve pas ses papiers d'identité mais il possède une petite toupie. Et je repense à ce film, Inception. La toupie de la scène finale avaient fait pas mal parler à l'époque. Et si je la faisais tourner ? Mais j'entends un raclement. Une silhouette étrange se dessine au loin. Elle se précise à mesure qu'elle approche. L'homme, ou la femme, avance comme au ralenti. Ses membres oscillent comme s'ils étaient plastiques. Il est coiffé d'une espèce de crête, comme les punks. Mais son épingle n'est pas fichée dans son oreille. En fait, un énorme pic noir et tordu est enfoncé dans son abdomen. Cette chose noire agite les bras dans tous les sens. Ses yeux et sa bouche sont deux trous blancs. J'ai vu des trucs bizarres dans ma vie, notamment depuis que je bosse pour Black Rain. Ce truc en fait partie.
On dirait que ça parle, que ça tente de parler. Mais je ne comprends rien. J'entends mal. C'est comme si le son de sa voix était couvert par autre chose, sauf qu'il n'y a aucun autre bruit parasite. Je me concentre et tente de saisir des bribes de phrases.
« ...la performance de l'ostracisme s'évade... des vapeurs du maelström... guette la pointe de l'esprit... »
OK, je ne vais même pas faire semblant de chercher. Ce truc raconte n'importe quoi. Comme il est lent, j'ai encore le choix. Je peux m'enfuir et abandonner le corps, en espérant pouvoir revenir, ou essayer de buter cette chose et poursuivre mon investigation de la scène de crime. Je ne sais pas si c'est très rationnel mais j'ai envie de me la coller avec ce truc. Je sens que je peux me le faire. Et puis, de toute façon, je suis déjà mort.
Je ne suis pas mort mais je fais bien semblant. Les mains de la chose ont changé. Elles sont devenues squelettiques et le monstre est devenu bien plus vif et agressif qu'au début. Quand j'émerge, j'ai mal partout et je suis crevé. Et je me sens très con. Au moins, ce truc est parti. Je regarde autour de moi et constate que rien n'a changé au niveau de la scène de crime. Je doute de trouver ici de quoi autopsier la victime. Je l'examine sommairement et tente de reconnaître les angles des entailles. Je veux m'assurer qu'il s'agit bien du même tueur, ou au moins qu'il a la même corpulence. Et à vue de nez, c'est le cas. Cette victime est plus petite que celle de Berlin. Et les diverses entailles tendent à confirmer la taille moyenne du tueur. Je n'y crois pas beaucoup mais peut-être qu'ici il a laissé quelque chose permettant de l'identifier.
Et il ne faut jamais cesser d'y croire. Ce doit être la toupie d'Inception. Je suis dans un rêve. Et dans un rêve, les indices tombent finalement. Pas la toupie. Et ça, c'est un des stigmates recensés du tueur. Ce masque de cuir avec des cornes de cerf. Que fait-il ici ? L'a-t-il oublié ? L'a-t-il abandonné volontairement ? A-t-il été contraint de le laisser là  ? Il est possible que lui aussi ait été surpris par le truc avec le pic dans le bide ? Dans ce cas, contrairement à moi, il se sera tiré en vitesse, perdant ou oubliant de récupérer son masque. En tout cas, ce masque est une bénédiction car autant il prend soin d'effacer toute trace sur le corps de la victime et la scène de crime, autant je doute qu'il ne passe son propre masque au peigne fin. Et là , justement, je suis quasiment certain de trouver des traces d'ADN. À condition de pouvoir quitter cette ruelle rouillée et trouver un laboratoire avec l'équipement suffisant.
Je range le masque dans ma poche. Il sera plein de mes propres empreintes mais je saurai faire la différence. Puis, ce rapport ne sera pas destiné aux forces de l'ordre mais à Black Rain. Quand je lève les yeux, la pierre a remplacé l'acier rouillé. Je ne suis plus à Silent Hill. Je suis de nouveau à Berlin. Une nouvelle scène de crime.
C'est bien ce que je croyais. Ce type est un tueur en série. Il a recommencé. Et si je ne le trouve pas rapidement, il recommencera. Je donne des ordres aux agents de la RPA qui sont avec moi. Je parcours la scène de crime. Une fois de plus, je reconnais la rune Hshl dans les plaies infligées au dos de la victime. En réalité, je fais semblant d'inspecter cette scène de crime car je la connais déjà . Je la connais par cœur. En fait, je rassemble mes idées.
L'assassin semble donc être un tueur en série de ceux qu'on considère comme « organisés ». Il est de corpulence et de stature moyenne. Il choisit ses victimes en fonction de la facilité à leur tendre une embuscade. Il doit les espionner pendant plusieurs jours avant de passer à l'attaque. Ensuite, il reproduit le meurtre métaphysique et laisse sur le dos sa propre marque, la rune Hshl. Cherche-t-il par-là à ouvrir un portail vers un autre monde ? Est-ce une provocation à l'encontre de Black Rain ? Peut-être les deux, mais j'ai tendance à croire qu'il agit sous l'emprise d'un délire mystique inspiré par une pathologie mentale (schizophrénie ?) et ou une drogue quelconque (la Bille ?). Sur une précédente scène de crime, j'ai trouvé des restes de nourriture. Y a-t-il ici, encore, des traces de sa présence ? Est-il encore à proximité ?
Je regarde autour de moi si le corps a été traîné. Il est possible que le tueur lui soit tombé dessus un peu plus loin. Aucune trace significative. Pour autant, rien ne prouve que la victime a été agressée là où on l'a trouvée. Je cherche autour de moi le meilleur endroit d'où on peut espionner les environs sans être repéré. Il y a bien une sorte de cache dans des ruines mais je n'y trouve aucune trace de présence récente. Le tueur sait-il que je suis sur sa piste ? A-t-il pris plus de précaution ? Et le témoin ? Il y a toujours un témoin. A-t-il, lui, laissé des traces ? J'élargis le cercle de mes recherches et finis par trouver des empreintes dans la boue. Sont-ce celles du tueur ou du témoin ? Je peux peut-être le rattraper.
Je me mets à courir aussi vite que je peux en tentant de ne pas perdre cette précieuse et infime piste. Je ralentis quand j'aperçois une silhouette filant aussi discrètement que possible. Du moins le croit-elle. Je m'écarte du milieu de la rue et continues ma filature. Je suis tenté de le suivre jusqu'à sa planque mais ce serait prendre le risque de le perdre. Aussi, je lui tombe dessus sans prévenir !
L'homme ne semble pas surpris. Il se défend même. Je pense qu'il m'avait repéré. Mais heureusement, j'ai le dessus et le traîne jusqu'à la scène de crime et mes collègues de la RPA qui l'embarquent sous bonne surveillance. Alors que je le vois s'éloigner, encadré par deux agents de la RPA, j'ai un doute. Je le trouve un peu... petit. Est-ce vraiment le tueur ou est-ce le témoin ? J'espère au moins qu'il s'agit bien de l'un des deux.
Les magouilles administratives de Black Rain me permettent de mener l'interrogatoire bien que je ne sois que légiste. Plus je le regarde et plus j'ai un doute quant au fait qu'il s'agisse bien du tueur. Il se gratte la tête de manière compulsive. Il a pourtant quelque chose d'hostile dans le regard. Je ne le sens pas de l'accuser de front. Je commence donc plus simplement en lui demandant de décliner son identité et de m'expliquer ce qu'il faisait là .
Jasper Fünf a 32 ans. Il était coiffeur avant la guerre. Il perd alors une bonne partie de sa contenance et explique s'être retrouvé là parce qu'il cherchait quelque chose, n'importe quoi, qu'il aurait pu échanger contre de l'alcool. Il confesse un problème de boisson. Ça a commencé avec la guerre mais il reconnaît aussitôt que, selon lui, les germes de son alcoolisme sont antérieurs au début du conflit. Il est marié mais il vit seul. Son épouse est retourné auprès de ses parents. Officiellement, il s'agit de prendre soin d'eux. Mais, en réalité, elle a fui son mari alcoolique et Berlin en ruine. Je suis de plus en plus convaincu qu'il s'agit du témoin. Il a vu quelque chose et je dois savoir quoi.
Je ne lui pose pas la question. J'affirme qu'il a vu quelque chose aujourd'hui. Je lui confirme que ce n'est pas le fruit de son imagination. Il n'avait pas trop bu. Il a vraiment vu un homme avec un masque de cuir et des cornes de cerf agresser un vieil homme. Et il y avait un porc. Mais je veux en savoir plus. Et là , à ma grande surprise, il s'effondre. Il se met à pleurer. Et je me demande si certes il est un témoin mais est-il réellement LE Témoin ? Pourtant, il était là . Il a vu le meurtre. Il doit pouvoir me dire quelque chose sur le tueur.
Je ne devrais pas divulguer trop d'informations sur l'affaire mais j'enfonce le clou en lui disant que ce n'est pas le premier meurtre, ni le dernier ! Je dois savoir ce qu'il a vu ! Il a forcément quelque chose à m'apprendre sur le tueur. N'importe quoi, n'importe quel détail qui me mettra sur sa piste. Il sait et je dois savoir !
Jasper sanglote. Je lui propose un café et une cigarette. Il refuse le café mais accepte la cigarette. Il se reprend, un peu. Je me calme aussi. Je m'excuse si j'ai pu paraître un peu... agressif, mais cette affaire est très grave. Il fait signe qu'il comprend. Alors, a-t-il quelque chose à me dire ?
Jasper lève les yeux vers moi. Il a entendu le tueur parler. Il ne sait pas s'il parlait à la victime ou s'il parlait tout seul. Il n'a pas bien entendu car il était trop loin mais, à un moment, le tueur a crié un prénom : Eurydice. Il y avait comme de la colère dans sa voix mais pas seulement. De la tristesse aussi.
Eurydice... ça ne peut pas être un hasard.
Je ne sais pas comment je suis arrivé là . Mais si je suis là , c'est que je suis mort. Le Tas de Merde, la Plage des Cafards. Là , on charrie des ordures pendant toute la journée. Et ça dure des jours, des semaines, des mois... On perd le fil du temps.
Au début, je cherchais un moyen de m'enfuir mais la merde s'étend à l'infini. La seule chose qui nous barre la vue, ce sont ces espèces d'usines qui ressemblent à des temples grecs. C'est là que nos gardes nous guident, les cafards géants.
Je ne sais pas ce que je fous là . Je ne cherche même plus à le savoir.
Je fais mon job et puis c'est tout.
Los Angeles, le 7 juillet 2019. Environ 11 heures du matin. Je suis appelé sur une scène de crime. Derrière un fast-food, alors qu'il allait jeter des sacs poubelles, un employé a remarqué le cadavre d'un porc. Et en s'approchant, il a remarqué...
C'est dingue. C'est la même configuration qu'à Berlin. Il y a tout juste un instant, j'étais en 1952 avec le témoin, Jasper Fünf. Et là , à peine l'interrogatoire terminé, je suis sur une nouvelle scène de crime, la même, à Los Angeles, en 2019. OK, je ne me pose pas de questions. Enfin, je ne me pose celle-là , celle de savoir le pourquoi du comment. Les questions que je dois me poser concernent les indices que je peux trouver ici. Et ici, y a-t-il un Jasper Fünf ou un autre indice ? Contrairement à Berlin, en 1952, ici il y a des caméras de surveillance. J'ordonne qu'on les mette de côté. Je fais mon boulot sur la scène sans vraiment y penser. Je sais exactement ce que je vais trouver, jusqu'à la rune Hshl qu'on devine dans les entailles pratiquées sur le dos de la victime. Je pourrais taper mon rapport à l'avance. En fait, je pense à ces vidéos. Je suis plus que pressé de les visionner. J'espère que, même s'il est intelligent et pense à beaucoup de choses, le tueur aurait négligé la présence de caméras de sécurité. Voyageant entre les mondes, il aura peut-être, je l'espère, oublié ce détail. Et puis, c'est un des traits caractéristiques des tueurs en série. À force de ne pas être pris, ils se croient tellement supérieurs qu'ils en commettent l'erreur fatale. Je fais donc mes prélèvements, mécaniquement, et garde à l'esprit que le tueur, peut-être, tue et grave la rune pour voyager entre les mondes et retrouver Eurydice. Cela ne change rien au fait qu'il est peut-être un toxicomane et/ou un malade mental en proie à un délire ésotérique mais, en tout cas, il est bien informé pour connaître l'existence d'Eurydice. Que lui veut-il ?
De retour au LAPD, je fonce au local visionner les bandes. Enfin, ce ne sont pas des bandes car aujourd'hui, tout est numérique. Bingo ! Le tueur a commis l'erreur que j'espérais. On le voit traîner les corps, celui du porc et de la victime. Le meurtre a eu lieu ailleurs, un peu plus loin. Pas très loin mais dans un endroit plus discret. Ce n'est qu'ensuite que le tueur a déplacé les corps afin qu'on les trouve. En fait, comme un vrai tueur organisé, il a opéré dans un lieu où il se savait en sécurité le temps de faire ce qu'il avait à faire. Il savait qu'on ne l'interromprait pas. Par contre, il a besoin qu'on trouve les corps. Or, ce moment là ne fait plus partie du rituel. Aussi, il a enlevé son masque, celui en cuir avec les cornes de cerfs. Je zoome autant que possible sur son visage. Je fais venir en toute urgence un technicien spécialisé pour qu'il me rende l'image aussi nette que possible. Qui est cet homme ?
Je crois que je le tiens. C'est effectivement un homme de stature moyenne. Cela apparaît sur la photo imprimée par le technicien, il porte un collier, comme un collier de chien, comme ceux que portent les sadomasos. Ces crimes, ses crimes, seraient-ils commandités par quelqu'un d'autre ? Aurait-il finalement un complice ? Je pense à Antéros. Haze a eu affaire à lui et le SM serait bien son genre. Objectivement, je ne peux rien affirmer mais c'est une piste à creuser.
La Plage des Cafards. Ça fait combien de temps que je suis là  ? Je ne sais plus. J'ai l'impression que ça fait des siècles. Des rumeurs courent. On dit qu'on peut s'enfuir. On dit qu'il y a des Passeurs, des gens qui savent comment faire pour se tirer d'ici. Mais s'ils savent, pourquoi ils ne se tirent pas eux-mêmes ?
Au loin, une sirène de chantier ou d'usine se fait entendre...
Il pleut. Il y a du brouillard. Je ne suis plus à LA, ni à Berlin. Il y a un instant, j'étais dans un local du LAPD à visionner des bandes. Et maintenant, je suis sous la pluie, la Pluie Noire, face à une nouvelle scène de crime. C'est toujours la même scène. L'homme âgé, le pantalon aux chevilles, le porc, mort, à côté. Par acquis de conscience, je retourne le cadavre et retrouve la rune tailladée dans le dos. Je ne suis pas une Mouche. Je ne sais pas vraiment comment ça marche. Moi, pour voyager entre les mondes, j'utilise mes propres runes. Mais, toutefois, je ne crois pas que la rune Hshl fonctionne comme ça. Je ne crois pas que graver une rune Hshl ouvre un passage. Pour ce que j'en sais, le motif de la rune est déjà présent et indique un passage. Graver un rune n'est pas sensé ouvrir un passage. Pourtant, j'ai bien l'impression que mon tueur pense que ça marche ainsi. Et on dirait que pour lui... ça marche ! J'ai déjà fouillé une scène de crime et n'ai pas trouvé de passage. Est-ce que ça vaut vraiment le coup ici ? Il pleut et la pluie a certainement déjà effacé la plupart des indices que j'aurais pu relever. En plus ici, je suis seul, pas d'équipiers du LAPD, pas d'agents de la RPA. Il n'y a même pas de commissariat en réalité. Mais il y a peut-être un témoin et un passage, malgré tout. Un témoin... Et si ici, à Silent Hill, je trouvais un Jasper Fünf ?
Je sors de la ruelle en courant. Je crois apercevoir une silhouette. Je ne cries pas pour ne pas l'effrayer ou attirer son attention. Je veux juste lui tomber dessus. Je cours. Le paysage défile autour de moi. L'air siffle à mes oreilles, comme une sirène d'usine. Autour de moi - effet de la vitesse ? -, le bitume s'effrite et s'envole en nuée de limaille de fer. La pluie devient cendre. Mes pas résonnent sur le sol. Ça sonne creux. Je cours sur des dalles d'acier. Autour de moi, tout devient rouge. Les murs se couvrent de rouille et de tâches brunâtres que je sais être du sang. Je rattrape la silhouette. Je veux m'arrêter net mais je suis emporté par mon propre élan. Je reconnais ce truc. C'est le truc noir avec le pic dans le ventre. Il tourne vers moi sa figure noire avec ses trous blancs à la place des yeux et de la bouche. Emporté par mon élan, j'ai peur de m'empaler sur son pic. Mais, je me laisse emporter et lui saute dessus, poings en avant.
Le truc m'accueille à bras ouverts et... je m'empale littéralement sur son pic. Je ne crains pas la mort puisque je suis déjà mort mais ça fait mal quand même. Et ça fait chier. Il me serre fort. Je suis trop mal pour réagir. Il me fixe de ses yeux vides et je vois.
Nous sommes chez Haze. Tous les trois. La Reine n'est pas là . La Reine est morte. Haze nous a fait venir car il veut savoir qui l'a tuée. Et il veut savoir qui de nous va la remplacer. En effet, il s'est avéré que la Reine avait un rôle à jouer dans toutes cette histoire avec le Seigneur des Recoins et les Homosantos. Nous ne le savions pas à l'époque mais c'était pour rejoindre Kid et Eurydice qu'elle avait quitté la RIM. C'était avant que Haze ne la retrouve et la remette aux Soars qui l'ont ensuite remise à Lewis-Maria.
Haze est convaincu que c'est l'un de nous qui a tué la Reine. Il a raison. Je le sais car je sais que c'est lui qui l'a tuée. Et je crois qu'il sait que je sais. Je ne sais pas si le Cafard le sait. Peut-être... Après tout, il a violé la mémoire de la Reine. Il y a peut-être trouvé des choses qu'elle et lui seuls savent.
Lors de notre petite réunion, je n'ai rien dit. J'ai laissé entendre à Haze que je savais mais je n'ai rien dit. Je ne sais pas pourquoi. Nous ne savons pas qui est sensé reprendre le rôle de la Reine. Ce n'est pas Haze, ça c'est sûr. Alors qui ? Le Cafard ou moi ?
C'est le moment de choisir. Mais de choisir entre Lewis-Maria ou moi. C'est le moment de choisir entre ces trois dernière scènes de crimes.
Empalé sur le pic du truc noir aux yeux blancs, je suis pris de Vertiges... Logiques ! Avant de m'écrouler, de sombrer dans l'inconscience dont je reviendrai, je le sais, en parfaire santé, je choisis...
Merde ! Je choisis quoi ? Berlin et son Jasper qui affirme que le tueur a hurlé le nom d'Eurydice ou Los Angeles et sa vidéo laissant penser que le tueur est un maso et que son dominant est peut-être le commanditaire des crimes ou son complice ?
Me regard se voile. Je suis de nouveau sur la Plage des Cafards. Je revois le moment où j'ai acquis mes premières runes, celles qui me permettent d'accéder à la dimension du Voyeur. S'il y a une raison pour laquelle le Cafard serait plus digne que moi de reprendre le rôle de la Reine, c'est pour ça !
L'idée que le tueur soit animé par une sorte d'élan romantique, qu'il tuerait pour trouver Eurydice, ne me satisfait pas complètement. Mais qu'il s'agisse d'un masochiste tuant sur ordre de son dominant me satisfait encore moins. Je réfléchis et finis par penser que s'il reproduit la rune Hshl, ce n'est peut-être pas pour tenter de trouver ou ouvrir un passage vers un autre monde. C'est peut-être pour montrer qu'il sait quelque chose. Et s'il cherche Eurydice, ce n'est peut-être pas motivé par un sentiment amoureux. Par quoi ? Pourquoi ? Je ne le sais pas encore. Mais peut-être qu'en reproduisant le meurtre métaphysique, que ce soit à Berlin, Los Angeles ou Silent Hill, et en marquant sa victime de la rune, il souhaite attirer l'attention d'Eurydice. Il a quelque chose à lui dire ou à lui demander. La rune n'est pas une provocation contre Black Rain. Il veut montrer à Eurydice qu'il est sérieux.
Eurydice, c'est la Reine qui, la première d'entre nous a fait sa connaissance. Et finalement, que Haze l'ait tuée avant ou après l'avoir remise aux Soars – plus rien n'est sûr aujourd'hui – ça, ça ne change pas. La Reine a et aura toujours croisé la route d'Eurydice et de Kid. Et la menace des Homosantos plane toujours.
OK, je choisis Berlin !
Comme la question de l'état du chat de Schrödinger, toutes les possibilités s'écroulent alors que j'ouvre la boite (de Pandore?) qui me ramène à Berlin en 1952.
Mon tueur est un sorcier, un mystique et peut-être bien aussi un malade mental et un toxicomane. Mais il est aussi bien informé quant à la réalité des choses. Il ne connaît pas tous les secrets (mais qui les connaît?). Il n'est pas aussi bien informé que peuvent l'être les agents de Black Rain, les Cafards et les Soars mais il sait des choses et veut en savoir plus. C'est pour ça qu'il cherche Eurydice, j'en suis convaincu maintenant. Il ne tue pas par plaisir sadique. Instrument de l'Entropie, il a déjà fait son job. Non, il continue de tuer pour attirer l'attention de celle dont il pense qu'elle a les réponses à ses questions.
Et il ne s'arrêtera pas tant qu'il n'aura pas ses réponses. La preuve ? Cette nouvelle scène de crime. Je regarde, j'observe et donne des consignes. Rien ne me laisse penser qu'il est encore dans les parages. A-t-il eu ce qu'il voulait ? Eurydice s'est-elle montrée ? Arrêterait-il de tuer si elle se montrait ? Accepterait-elle de se montrer si elle savait que cela stopperait cette série de meurtres ? Et si je la cherchais, elle ? Mais où est-elle dans cette réalité ? Comment la trouver ? Comment attirer son attention ? Ou comment faire savoir, faire croire au tueur que j'ai compris et que je sais où la trouver ?
Alors, je donne de nouvelles consignes. Je ne lance pas les agents de la RPA sur la seule piste du tueur mais aussi sur celle d'Eurydice. Et de nouveau, devant moi, la réalité ondule. Je la vois comme à travers une sorte de voile invisible mais agité par une brise légère. Les silhouettes de mes collègues ondulent elles aussi. J'avance prudemment. Je lis sur leurs visages déformés que l'expression de mon visage les questionne. Bien que ma vision se trouble, je les entends parfaitement. Ils me demandent si ça va, comment je me sens. Je ne sais pas ce que je veux leur répondre. Je ne sais pas comment je me sens.
J'ai chaud. Il fait déjà très chaud ce matin à Los Angeles. On est dans un squat. Une nouvelle scène de crime. Une nouvelle victime. Un nouveau porc. Une nouvelle rune. Nous sommes le 8 juillet 2019. La victime du 7 n'existe pas puisque j'ai choisi celle de Berlin. D'ailleurs, ce serait intéressant de vérifier dans les archives s'il y a eu des meurtres à Berlin en 1952. Normalement non, mais...
Je ne peux rien dire à mes collègues mais j'ai une nouvelle piste : Eurydice. Je fais mon travail de légiste, comme d'habitude. Je ne néglige rien mais j’avoue que mon esprit est ailleurs. Comment utiliser cette information pour tendre un piège au tueur ? Et si je pouvait trouver Eurydice avant lui ? Et j'ai un flash ! Il sait qu'Eurydice existe. Il connaît la rune Hshl. Il sait certainement que d'autres mondes existent et qu'on peut les atteindre. Il est aussi très probable qu'il se drogue. Dans ce dernier cas, consomme-t-il de la Bille ou de la Noix ? Cela expliquerait bien des choses. Aussi, je cherche des traces de ces drogues sur les lieux. Et je trouve... des coquilles de Noix. Et je me rappelle également qu'il y en avait sur une des scènes de crimes berlinoises. J'avais pensé qu'il ne s'agissait que de nourriture, pour patienter. Mais non ! Il est aussi fort probable que le tueur ait pris de la Noix. Et dans ce cas, où la trouve-t-il ? Il doit être en contact avec la Magicienne. C'est la principale dealeuse de Noix.
J'ai maintenant deux nouvelles pistes, si on veut appeler ça comme ça. Je dois trouver Eurydice et la Magicienne. Je demande à Black Rain s'ils ont des informations sur Eurydice. Non, mais elle doit forcément être présente dans ce monde-ci. On ne veut pas me dire le pourquoi du comment mais mon interlocuteur affirme qu'Eurydice est là , à Los Angeles. Il ne peut rien me dire de plus si ce n'est que, si je la cherche, je finirais bien par la trouver.
J'aurais peut-être plus de chance avec la Magicienne. Dealeuse, elle a peut-être déjà eu à faire avec la police. Aussi, je me mets à éplucher les archives. Rien ! En vérité, je ne sais pas si je dois m'en étonner.
Retour à la case départ ? Pas tout à fait. Pas encore.
Elle est là et j'ai toujours su qu'elle était là . Dans ce monde, dans les mondes... La Reine est morte mais pas elle. Elle, elle est folle. Rendue folle par ses visions, la Bille et la Noix.
Si je la cherche, je finirais bien par la trouver. C'est ce qu'a dit le gars de Black Rain. Et je n'ai pas eu à chercher bien loin en vérité. Je l'ai finalement vite trouvée. J'ai pensé faire le tour des hôpitaux et des centres de désintox ou des foyers pour sans-abris. Mais c'est finalement dans un squat pourri que je l'ai trouvée.
Elle était là , au milieu des ordures. Ordures humaines et ménagères. Déchet parmi les déchets. Rongée par la Bille, la Noix et ses visions. Alors, je l’ai prise dans mes bras et je l'ai ramenée chez moi. Eurydice...
Elle n'est pas folle. Elle croit qu'elle est folle mais je sais que ce n'est pas le cas. A-t-elle rencontré Kid et la Reine dans cette réalité ?
Elle me fait de la peine. Elle est juste submergée, bouffée non pas par la drogue mais par le poids de ses visions. Comme la Reine, comme nous tous finalement, elle a un rôle à jouer. Mais le sien est écrasant. Quel était le rôle de la Reine par rapport à elle ? Est-ce finalement moi qui doit remplir ce rôle maintenant ?
Je n'ai pas fait que ramener Eurydice chez moi. J'ai aussi ramené le squat, le caniveau de son âme. Et mon salon, mon appartement tout entier se mettent au diapason de l’inconscient d'Eurydice.
Pas besoin de la sirène de chantier pour savoir où je suis maintenant.
Silent Hill...
De retour à Silent Hill, je m'attends à ce que ce truc avec le pic dans le ventre me tombe de nouveau dessus. Mais si cette ville et son double rouillé sont des émanations de la psyché d'Eurydice, que représente cette créature pour elle ? Est-ce son « croquemitaine » ? ou alors, est-ce une sorte de protecteur ? Contre qui ? Le tueur ? Moi ?
Cet être noir avec ce pic ressemble à une sorte de poupée vaudou. Un truc maudit...Et si je lui ôtais ce pic, qu'est-ce qui se passerait ? Est-ce que ça aiderait Eurydice à sortir de sa catatonie ? Je m'assure qu'elle va aussi bien que possible et sors. Je n'ai aucune idée de comment faire mais j'espère que ce truc vaudou va me trouver. L'espace d'un instant je me surprends à penser que ce serait peut-être bien lui mon tueur, mais ça ne tient pas debout. Mais ce ne serait pas la première fois que la vérité ne tiendrait pas debout. Finalement, qu'est-ce qui fait que toute vérité n'est pas bancale ? C'est peut-être parce qu'elle nous permet à nous de rester stable. Mais si on prend une béquille, elle est incapable de rester debout toute seule. Pourtant, grâce à elle, nous pouvons tenir debout. C'est peut-être ça la vérité, une béquille incapable de tenir debout mais qui nous permet de le faire. En fait, nous nous appuyons autant sur la vérité qu'elle s'appuie sur nous. Mais ce ne sont pas ces genre de pensées qui vont me conduire au truc.
Je me rappelle l'avoir vu dans une ruelle. Aussi, je quitte au plus vite les grandes avenues brouillardeuses pour m'enfoncer dans un réseau de petites rues encore plus sombre. J'entends des bruits étranges. Des cliquetis métalliques, des raclements, des gémissements, des cris. Tout ça a l'air à la fois très proche et très loin. J'aperçois des silhouettes, des ombres à travers le brouillard. Elles bougent d'une manière étrange. Leurs mouvements sont saccadés. J'ai par moment l'impression d'assister à une chorégraphie de danse Buto. Mais je reconnais pas de silhouette avec un pic dans le ventre. Est-ce que ce truc sait que je le cherche ? Se cacherait-il ? Pourtant, il m'a déjà battu.
Et il me vient une idée complètement débile. À un moment, ses mains sont devenues celles d'un squelette. Un squelette, c'est un mort. Je suis mort. Si ce truc est sensé être le croquemitaine ou le protecteur d'Eurydice, que se passerait-il si moi, un mort, je me plantais un pic dans le ventre ? En vérité, ça ne me tuerait pas. J'ai presque envie d'essayer. Presque... En m'enfonçant dans l'entrelacs de ruelles obscures, je cherche quoi que ce soit qui pourrait faire office d'arme. Rien évidemment. Rien sauf... cette sirène. Et le monde change. Après avoir été rongée par l'humidité ambiante, c'est maintenant la rouille qui s'empare des rues. Et avec la rouille vient le truc.
Je n'ai pas d'arme. Il m'a déjà laissé pour mort. Autant dire que je ne pars pas gagnant. Pourtant, je ne compte pas me défiler. Je veux savoir ce qui se cache derrière les trous blancs de ses yeux. Je veux savoir ce qui se passe quand on lui retire son pic. Alors, je n'attends pas et me jette sur lui. J'essaye de m'emparer de son pic justement. Au mieux, j'arrive à le lui retirer d'un coup. Au pire je dois pouvoir le tourner et lui faire assez mal pour qu'il ne riposte pas. Enfin ça,c'est si je l'atteins.
Rien n'est gratuit dans la vie. J'empoigne le pic mais le truc se saisit de moi et m'enserre. Impossible de me dégager. Pour autant, je ne veux pas lâcher ma prise. J'essaye de tourner le pic mais il me serre trop fort et je ne parviens à impulser le mouvement que je veux. Alors, je plonge mes dents dans son cou et tente de lui arracher un bout de chair. C'est caoutchouteux et cendreux. Le truc n'a aucune réaction et continue de me serrer contre lui. Au moins, cette fois je ne suis pas empalé. D'une certaine façon, pour l'instant j'ai de la chance. Mais ça ne va pas durer. Aussi, malgré tout, je tente de faire glisser, coulisser le pic. Ça vient petit à petit mais le truc resserre sa prise. Ça fait mal mais ça veut dire qu'il n'aime pas. Alors, je continue. Je tente de forcer la chance et ma vue se brouille alors que l'étau se resserre. J'entends, je sens mes côtes craquer. Je lâche ma prise. Il ne lâche pas la sienne. Est-ce que cette saloperie peut parler ? Je sens que je vais bientôt perdre connaissance. Alors, je joues ce que je pense être un ultime va-tout. Je lâche le nom d'Eurydice en espérant qu'il comprenne et me relâche.
Et ça marche ! Il desserre son étreinte et me repose doucement par terre. Il me fixe de ses grands yeux blancs mais je n'arrive pas à comprendre ce que ce regard peut bien exprimer. Alors je continues. Je dis que je connais Eurydice, que je sais où elle est et espère pouvoir observer une réaction qui aurait du sens. Et il se passe un truc de dingue ! Sa bouche et ses yeux se mettent à grandir. Ils deviennent énormes. Et les trous se rejoignent pour n'en former plus qu'un qui envahit tout son visage, toute sa tête. Et sa tête devient énorme. Le trou blanc devient énorme. De l'autre coté, c'est blanc et éclatant. Je repense à cette scène de Fight Club, quand le personnage incarné par Edward Norton explore sa caverne intérieure. Il y croise un pingouin qui lui dit « Glisse ! ». Et j'ai envie de glisser moi aussi dans ce grand trou blanc et éclatant. Où ça va me mener ? Le Multivers est infini mais il y a deux mondes où je n'ai pas envie de tomber. Millevaux et Mantoïd. Et comme on ne peut pas dire que je sois le type le plus chanceux de la Terre. Faites au moins que ce ne soit pas les deux en même temps...
Gagné, perdu, je ne sais pas. Je suis dans Millevaux, pas de doute. Il y a des arbres partout. Mais je suis aussi perdu en montagne. Le sol est escarpé et rocheux. À travers les arbres, je vois le soleil se lever. Il tombe une pluie fine. L'air de rien, ça fait du bien. J'ai encore mal partout après ce que m'a fait subir le truc dans Silent Hill. Finalement, j'ai percé un de ses secrets mais pas celui que j'espérais. Je voulais savoir ce qui le liait à Eurydice et je vois qu'il est une sorte de porte vers Millevaux. Peut-être qu'il est aussi une porte vers plein d'autres endroits. Mais moi, il m'a envoyé à Millevaux. Et je comprends vite pourquoi. Je fais quelques pas et découvre une nouvelle scène de crime. La même, toujours. Comme à Berlin. Comme à LA. Comme à Silent Hill. Il y a tout. Le type avec le pantalon aux chevilles, le porc, la rune Hshl tailladée dans le dos. Tout ça a forcément du sens. C'est juste que je suis trop con, trop fatigué ou juste trop humain pour comprendre. J'ai besoin de repos. Mais c'est vraiment pas le bon moment. Mes pas font un bruit d'éponge en s'enfonçant dans des plaques de mousse imbibées d'eau de pluie. Je regarde autour de moi. Alors que j'étais sûr de rien trouver, je vois !
Une tablette de bois. Elle n'est pas très grande. C'est vraiment un coup de chance que je l'ai remarquée. Il me la faut. Je m'en saisis. Elle est couverte de signes que je ne connais pas, mais j'en comprends pourtant le sens. Il y a des symboles géométriques et des chiffres qui ne trompent pas. C'est un sort. Et je dois pouvoir le reproduire avec les runes que je possède déjà . Mais quels en sont les effets ? C'est ça que je ne comprends pas.
Bon, je suis assez stupide pour tenter une combinaison de runes sans en connaître les effets. Mais je ne suis pas assez stupide pour associer n'importe quelle divinité de ce cycle à cette combinaison. Aussi, je choisis Mantorok, le Gardien. Quel que ce soit ce sort, ses effets devraient m'être bénéfiques. Alors ?
Un voile pourpre (la couleur du Gardien) teint la forêt autour de moi. Et je vois ! J'ai vu ! Mais mon cerveau n'a pas imprimé. Il n'a pas voulu imprimer. Je ne sais pas ce que j'ai vu. Le Gardien a-t-il voulu me préserver de la folie qui me fut révélée ? J'ai vu quelque chose que je n'étais pas sensé voir. Et il ne m'en reste aucun souvenir quand les effets du sort s'effacent. Même si la montagne et la forêt semblent désertes autour de moi, il y a ici quelque chose de dangereux. Je dois partir. Je lance un nouveau sort, celui qui me donne accès à la dimension du Voyeur. Je m'enfuis. Je fuis Millevaux.
J'explore la dimension du Voyeur. Je peux maintenant me rendre à peu près où je veux. Berlin, Los Angeles. Je peux même retourner à Silent Hill. Alors, que se passe-t-il là -bas.
Et je me vois à LA, en train de tester ce nouveau sort avec chacune des trois autres divinités. Mantorok a voulu me préserver dans Millevaux. Les autres ne prendront pas ces précautions. Que je périsse ou devienne fou les comblera de joie au contraire.
Puis, je suis à Berlin, dans les égouts. Qu'est-ce que je fais là  ? Je suis en train de tenir tête à un militaire ; un français on dirait. Est-ce en rapport avec le meurtre métaphysique ? Est-ce qu'une nouvelle piste berlinoise me mènerait dans les sous-sols ?
Je ne m'attends pas à trouver quoi que ce soit d'intéressant à Silent Hill. Ou plutôt, je m'attends à forcément voir là quelque chose de dangereux. Alors ? Alors c'est le monde à l'envers. On dirait bien que c'est là , finalement, que je suis le plus en sécurité. En fait, je me vois prendre du repos et récupérer de mes blessures. Eurydice n'est pas là mais je sais que je sais qu'elle va bien. Cette version du futur est tentante. Un peu trop même. Certes, je suis au calme pour l'instant, mais qu'est-ce qui m'attend ensuite ?
Je suis très tenté d'aller à LA pour en savoir plus sur ce nouveau sort. Mais je pense plutôt me rendre à Berlin. Si je suis dans les égouts, c'est forcément qu'une piste m'y a conduit. Si je suis là , c'est que je suis sur la piste du tueur. Cet abruti de Français me fait perdre du temps mais, sachant cela, je peux peut-être l'éviter.
Berlin, 1952, le secteur français, une nouvelle scène de crime. Je n'attends pas. Je n'attends rien. Je cherche immédiatement la bouche d'égout la plus proche. Elle est fermée mais des traces montre qu'on la bougée récemment. Je le tiens !
Les égouts sont sombres mais j'ai pensé à prendre une lampe. Je suis tenté de me mettre à courir mais je veux d'abord être sûr de prendre la bonne direction, mais aussi de ne pas me jeter dans la gueule des Français.
Je sais maintenant que le tueur est accro à la Noix. Aussi, je cherche quelques coquilles qui pourraient traîner et indiquer sa présence. Je sais aussi que taillader la rune Hshl sur le dos de la victime ne crée pas un passage entre le monde. Sinon, il l'aurait utilisé pour fuir.
La chance est avec moi. Je repère des traces de Noix. Je cours dans cette direction mais ne perçois à aucun moment quelque signe de sa présence. A-t-il déjà quitté les souterrains ? La Noix lui a-t-elle permis de quitter notre réalité ? À moins que... Je sors mes runes et la tablette trouvé dans la forêt. Peut-il se rendre invisible ? Si oui, c'est peut-être de lui, de sa vue, que Mantorok a voulu me protéger ? Mais il est le tueur métaphysique. Aussi, pour cette fois, je m'en remettrai à Ulyaoth, la divinité liée à la magie et à la spiritualité. Un voile bleu recouvre mon champ de vision. Et je le vois ! Il est loin. Je me mets à courir. Le voile bleu s'estompe. La silhouette du tueur aussi. Mais c'est trop tard... pour lui ! Je l'attrape par l'épaule et le retourne pour qu'il me fasse face. Il ne porte plus son masque de cuir. Je ne le connais pas, ça me rassure. Je lui flanque une droite en plein visage. Il s'écroule.
Personne à la RPA ne sait que je viens de l'arrêter. Aussi, je fonce vers les locaux de Black Rain. Je l'enferme dans un petit bureau et le laisse mariner le temps de négocier les termes de l'interrogatoire avec mes supérieurs. On le tient. Il ne tuera plus. Mais je veux savoir pourquoi il continuait à tuer et ce qu'il veut à Eurydice. Il n'est pas non plus exclu que son comportement soit lié à sa consommation de Noix. Aussi, la Magicienne est peut-être derrière tout ça. En fait, j'explique à mes chefs qu'il n'est pas impossible qu'elle l'ait rendu accroc à la Noix précisément pour le pousser à agir ainsi. Je leur demande donc l'autorisation de piocher dans nos maigres stocks de Pétrol'Magie afin de le contraindre à parler. Et on pourrait même en profiter pour le guérir de son addiction. Ensuite, il pourrait devenir le 8è prisonnier de la prison de Spandau, donnant ainsi corps à la légende. Mes chefs acquiescent.
J'entre dans le petit bureau accompagné de deux autres agents de Black Rain. Ils poussent devant eux une espèce de carcan sur roulette. C'est une structure en métal avec des lanières en cuir et de fins tuyaux en caoutchouc. Ils soulèvent le tueur et l'attachent au carcan. Il se retrouve ainsi débout, reposant inconfortablement sur la pointe des pieds. Son cou est enserré par un large collier en acier. Cela contribue à maintenir son corps dans une posture désagréable. De plus, il ne peut détourner le regard quand il voit l'un des agents remplir une poche plastique de liquide noir et y ficher le bout d'un des petits tuyaux. Je lis dans son regard qu'il comprend qu'on va lui injecter ce liquide qu'il ne sait pas être du Pétrol'Magie. Pourtant, il parvient à se retenir de crier. Je ne sais pas s'il est toujours sous l'influence de la Noix. Il y a un vrai risque d'overdose et, sur le coup, ni mes chefs ni moi n'y avons pensé. C'est trop tard maintenant. Je dois aller jusqu'au bout. Mais avant, quand même, je lui pose mes questions. Je ne lui demande pas qui il est. Dans l'immédiat, cela n'a aucune importance. Je veux savoir pourquoi il cherche Eurydice. Évidemment, il garde le silence. Je m'y attendais. Je fais un signe de tête et le liquide noir commence à couler dans le tuyau. Ce n'est pas de l'angoisse que je lis dans son regard. C'est plutôt une sorte d'hébétude. J'espère qu'on ne va pas lui griller le cerveau avant de savoir.
L'effet du Pétrol'Magie est immédiat. Le tueur convulse. Je jette un regard inquiet aux deux agents. Mais ils restent calmes. Le tueur tend son cou au maximum et scrute le plafond. Son teint devient jaune. Malgré tout, je garde mon calme et repose mes questions. Que veut-il à Eurydice ? Quels sont ses liens avec la Magicienne ? Il prend alors un air mystérieux. Je me retiens de lui flanquer un coup de poing. Je sens qu'il lutte contre la drogue. Derrière lui, de sorte à ce qu'il ne puisse pas le voir, un des agents me fait signe de patienter. Cela ne devrait plus trop durer.
Alors, est-ce la Magicienne qui lui a fourni la Noix ? Il répond que oui mais que ce n'est pas ce que je crois. La Magicienne n'a joué que le rôle de fournisseur. Elle n'a rien à voir dans sa quête d'Eurydice.
Et alors, pourquoi chercher Eurydice ? Son regard devient soudain très triste et il dit « … pour faire cesser les voix dans ma tête... » Les voix ? « … les Abeilles... les bourdonnements... »
L'interrogatoire se poursuit. J'alterne des questions banales sur son identité, sa planque, ses relations, ce qu'il faisait avant la guerre, pendant la guerre. Il n'a pas été victime des expériences occultes menées par les nazis. C'est toujours ça de pris. Je reviens ensuite sur son mode opératoire. Pourquoi reproduire ce meurtre ? Pourquoi ce « dessin » taillé dans le dos de ses victimes ? Et à chaque fois, c'est la même réponse. Les Voix. Les Abeilles.
Ce type est un pauvre type. Il n'a vraiment pas eu de chance. Il s'est retrouvé instrumentalisé par l'Entropie pour reproduire le meurtre métaphysique. Puis, dans la foulée, les Homosantos se sont servis de lui pour mettre la main sur Eurydice. Mais Eurydice va bien, je le sais. Elle est en sécurité à Silent Hill. Cette ville est dégueulasse mais je sais qu'un truc bizarre avec un pic dans le ventre veille sur elle. Je repense à la dernière fois où j'ai vu Haze et Lewis-Maria. On se demandait qui devait reprendre le rôle de la Reine. Je ne sais pas si c'est moi. Je ne sais pas si c'est ce rôle que j'ai joué. Mais en tout cas, pour le moment, j'ai quand même réussi à protéger Eurydice des Homosantos. Pour combien de temps ? Je n'en sais rien.
Commentaires de Thomas :
A. Forcément, je suis obligé de faire un lien entre le début de ce CR, un Psychomeurtre / Cold City joué à Berlin, avec L’Idole de Berlin, un de tes premiers CR joué avec mes jeux (mais sans Millevaux dedans, à l'époque). La boucle se boucle !
B. J'adore la bascule entre le cadre Berlin 1952 et Los Angeles 2019, sur la même histoire. Bon effet de vertige logique.
C. Ce masque de cuir avec des cornes de cerf. Que fait-il ici ? L'a-t-il oublié ?
Millevaux se fait discret dans ce dernier épisode. Ce masque en est le premier indice.
D. « Et le monde change. Après avoir été rongée par l'humidité ambiante, c'est maintenant la rouille qui s'empare des rues. Et avec la rouille vient le truc. »
De ce phénomène très silent-hillien, on pourrait aussi lire une prémisse de Millevaux : avec la rouille vient la pourriture, puis l'humus...
E. « Je dois partir. Je lance un nouveau sort, celui qui me donne accès à la dimension du Voyeur. Je m'enfuis. Je fuis Millevaux. »
Passage hyper rapide dans Millevaux, systématiquement fui par les personnages : soit on se dit que le multivers est une fausse bonne idée parce qu'il permet de quitter rapidement les univers les plus horrifiques, soit on se dit que la rareté de Millevaux en fait sa qualité d'univers-croquemitaine qui serait plus menaçant que les autres.
F. « Je l'attrape par l'épaule et le retourne pour qu'il me fasse face. Il ne porte plus son masque de cuir. Je ne le connais pas, ça me rassure. Je lui flanque une droite en plein visage. Il s'écroule. »
J'aime bien que le signalement physique du tueur s'arrête à ça, c'est intéressant.
G. Qu'as-tu utilisé de Perfect dans ce RP ?
Damien :
C. Le Masque est un des attributs du Tueur dans la Trilogie de la Crasse. Il y en d'autres mais j'aime bien celui-là . Et puis, c'est vrai qu'il évoque a forêt et donc, quelque part, Millevaux. En fait, j'ai mélangé et remis à ma sauce les BG de Millevaux, Mantra et la Crasse. Ce ne sont finalement plus tout à fait les uns et les autres mais un mix.
D. Ah mais c'est clairement Silent Hill. Il y a 3 niveaux dans ce scenar : Berlin, LA et Silent Hill.
E. Dans ma vision de Mantra et de La Trilogie de la Crasse, Millevaux devient une autre manifestation de l'Entropie. C'est un peu comme des bulles de putréfactions qui s'échappent du cadavre de l'Hommonde pour venir corrompre les autres univers. Donc oui, c'est vraiment un univers croquemitaine. On l'évite, on cherche à s'enfuir. On s'en préserve autant que possible. Mais il a sa vie propre. Après tout, je le conçois aussi comme un avatar de Shub-Niggurath. Pour moi, Millevaux est devenu autant le domaine de la Chèvre qu'une incarnation de la Chèvre elle-même et elle se répand.
F. Là , j'avais postulé que le tueur pouvait être un PNJ déjà rencontré, voire Haze lui-même. Les D en ont décidé autrement. Et c'est ptete pas plus mal ^^
G. Le Cycle narratif Crime/tentative de capture ou recueil d'indice/scène de « torture »/XP du criminel.
Hors ligne
GRÃ…TMYRSBAN, SECONDE PARTIE
Plongée au cœur du scénario de Gratmyrsbarn, avec une ambiance glaçante dans tous les sens du terme. Un enregistrement de partie par Claude Féry.
(temps d’écoute : 1H)
Joué le 05/01/2020
Le jeu : La Sorcière de l’écorce, un jeu de rôle suédois d’horreur folklorique et forestière par Pelle Nilsson et Johan Nohr.
Le scénario : Grätmyrsban, une glaçante histoire d'enfants disparus par Pelle Nilsson et Johan Nohr
Lilian D, cc-by-nc-nd
Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).
Commentaires de Thomas après écoute :
A. Intéressant ces archives sur les expériences de mort imminentes : à Millevaux, les souvenirs d’expériences de mort imminentes sont très recherchés
B. C’est astucieux d’avoir interprété un personnage dans le premier épisode pour le confier à Mathieu lors du deuxième épisode : dans ce type de scénario, l’irruption d’un nouveau PJ en cours de route serait mal passé.
C. Super intéressant que tu précise que le nom de la rivière est sami et non norrois : encore un crossover entre les sami et Millevaux…
D. Là encore tu fais un gros travail d’extrapolation sur le PNJ Anders
Gabrielle joue Sven
Mathieu joue Pelle
Xavier joue Chat-Chat
Hors ligne
GRÅTMYRSBAN, TROISIÈME PARTIE
La conclusion du scénario sous forme de pinacle horrifique, avec une fenêtre dimensionnelle ouverte sur Millevaux. Un récit et une partie enregistrée par Claude Féry
(temps de lecture : 3 min ; temps d’écoute : 1H49)
Joué le 05/01/2020
Le jeu : La Sorcière de l’écorce, un jeu de rôle suédois d’horreur folklorique et forestière par Pelle Nilsson et Johan Nohr.
Le scénario : Gråtmyrsban, une glaçante histoire d'enfants disparus par Pelle Nilsson et Johan Nohr
Avertissement : Contenu sensible (voir détail après l'image)
Alex Berger, cc-by-nc
Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).
Contenu sensible : maltraitance enfantine
L'histoire :
Nous avons donc joué la suite et la conclusion du scénario Gråtmyrsbarn.
Sven, aidé de Pelle, ont circonscrit le lieu de disparition de Veronika par leurs recherches et sont repartis, à ski cette fois, malgré d'inquiétant présages., (découverte de dépouilles d'animaux autour de leur ponton). Après s'être à demi égarés dans la réserve ornithologique et avoir exploré un vieux bunker désaffecté, ils ont suivi les traces laissées la veille par la motoneige et ont découvert le pick-up de Veronika sous un amoncellement de neige.
Le téléphone de Chat-Chat a fait de nouveau des siennes, (il avait reçu plus tôt un appel du numéro de sa sœur où une gamine fredonnait des phrases énigmatiques), et s'est calé sur la page YouTube d'un groupe oï russe. L'autoradio s'est mis en marche tout seul pour lui faire écho, puis à nouveau le froid et le murmure de la forêt.
Alors Pelle a cru discerner un reniflement et des pleurs étouffés par la distance. Ils ont remonté une sente forestière jusqu'à une clairière.
Là , une gamine était suspendue, attachée par une corde au-dessus d'une mare fangeuse, comme dans le snuff movie visionné sur le dark Web. Mais Elle fredonnait.
Sven a coupé la corde à l'aide d'une dague de chasse récupérée dans un vieux refuge de chasseur, ayant appartenu à un psychopathe ayant tué une gamine à coups de couteau et reconnu fou, capitonné dans un asile du sud du pays.
Mais à peine libérée la petite gamine s'est mise à flotter dans l'air, puis son visage réduit à deux puits sur un noir insondable a tenter de dévorer Pelle. Chat-Chat a mis le feu à la houppelande couvrant la créature et tous en en profité pour la fuir. Dans leur fuite, ils sont tombés sur Veronika, un bras cassé, gisant contre un arbre.
C'est elle qui avait suspendu la créature et c'est le seul moyen de contenir sa faim dévorante, son désir de vengeance sur les grands qui l'abandonnèrent au fond du bois lors des famines de 1905.
Après avoir repris le rituel et suspendu la créature, Sven débloque les portières de la voiture.
Millevaux
Lorsque Chat-Chat met la main sur la poignée gelée, (il avait ôté son gant pour utiliser son briquet), il contemple le même pick up tout rouillé avec sur la plate forme arrière une caisse contenant un missile. Le vieux Monsieur, lui sourit depuis le siège du conducteur.
Commentaire de l'auteur :
wow fantastic, many thanks »
Puis a retweeté sur son compte :
About a year ago we made Barkhäxan - an evil little game about horror in the forests of northern Sweden, not unlike The Blair Witch Project in tone. We only made it in Swedish, but these guys translated it into French (and also played it). We are very humbled.
Commentaires de Thomas après écoute :
A. La sensation de froid est bien rendue tout du long des trois épisodes
B. Sympa d’avoir prévu un effet sonore pour la sonnerie du portable de Chat-Chat
C. Hé hé à voir Xavier marri de perdre des PV, je pense à mon fils qui ne supporte pas ça non plus :)
D. J’adore le fait que Mathieu cherche une explication rationnelle aux caprices du téléphone de Chat-Chat :)
E. Remarque de game design de scénario : je me dis que ça doit être rarissime que les persos ne coupent pas la corde
F. Hé hé tu fais bien peur quand tu fais l’enfant qui chante:)
G. En écoutant, on réalise bien toute l’horreur du scénar : pour se protéger de l’enfant, il faut à nouveau l’abandonner…
H. C’est super intéressant le cliffhanger de fin avec morphing vers Barbaque ! Bel effet de vertige logique
Claude :
D. Chez Mathieu la suspension de l'incrédulité est au prix d'une démarche de cohérence immersionniste. Et même si il place des éléments pour se distinguer de son personnage il a beaucoup de mal à ne pas vivre la partie.
C'est un équilibre délicat à obtenir
E. L'auteur est un joueur de la scène OSR où la dimension tactique et les choix de la joueuse priment sur tout le reste.
G. Boule d'Or ?
Thomas :
G. Ah oui je ne m'étais pas rendu compte du parallèle, mais c'est évident. Mélocoton et Boule d'Or sont des enfants abandonnés.
(du moins dans ma vision des choses)
Hors ligne
LÈPRE NOIRE
Un épisode particulièrement sombre et cauchemardesque à la rencontre de trois sorcières qui hantent la forêt, les voies déchues et les rizières autour de Little Hô Chi Minh Ville. Un récit et une partie enregistrée par Claude Féry
(temps de lecture : 4 min ; temps d’écoute : 1h47)
Joué le 12/01/2020
Le jeu : We Forest Three par Rae Nedjadi : pour qui vous prenez-vous pour vous aventurer dans cette forêt que vos ancêtres ont abandonnée ? (un jeu OSR-Sword dream pour un seul perso, basé sur le folklore philippin)
Keith M Avery, cc-by-nc
Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).
Le bilan :
Nous avons joué avec Xavier et Alex une incursion dans Millevaux.
J'ai choisi de la bâtir autour du jeu We Forest Three.
Nous avons joué la procédure proposée par cet excellent jeu jusqu'à la rencontre avec la première des trois sœurs.
Nous avions convenu que cette partie est la mise en jeu du trouble ressenti par Albert, Petite et Léo lorsque Monsieur Clément, le chauffeur du pick-up leur a offert d'effeuiller l'un de ses almanachs glané sur sa route. Assis dans une maison en ruines à deux cents mètres de la voie déchue, ils ont brassé les souvenirs de Hin, Kaluna et Chat-Chat, des gamins d'en bas, une communauté forestière alimentant Little Hô Chi Minh Ville,
La partie fut plaisante même si Xavier a quelque peu tiré la couverture à lui.
Alex a déroulé le fil d'une lèpre mentale dont souffre Kaluma / Petite. Seule Kaluma voit la maladie progresser...une FOLIE ?
Le titre Lèpre noire est inspiré des remarques d'Alex lors du bilan et remet en perspective cette session au sein de notre campagne.
Xavier joue Leo / Chat-Chat / Kara / Cain
Commentaire de l'autrice
Wow this is so cool! I love seeing WE FOREST THREE used in such a creative way for campaign play
Commentaires de Thomas :
A. À l'époque où on faisait des donjons, on avait un sérieux problème de déséquilibre entre les joueuses assidues et les joueuses ponctuelles, les premières ayant gagné beaucoup plus de niveaux que les autres, elles pouvaient littéralement faire le scénario sans l'aide des secondes. Quelque part avec Xavier tu as peut-être le même problème option narrativiste. Comme Xavier joue le plus souvent, ses personnages sont plus étoffés et aussi il maîtrise beaucoup plus les codes de la table qu'il a activement participé à façonner. Forcément, en pente naturelle, il va prendre plus de place que le joueur plus ponctuelle qu'est Alex. Si c'est un vrai problème, je suppose qu'on peut le résoudre par le dialogue ou par un effort de ta part pour centrer l'intrigue sur les personnages des joueuses ponctuelles.
B. C'est très cool que tu informes les auteurices des jeu de tes parties. ça fait toujours plaisir je pense.
C. Peux-tu nous donner un peu plus de détails sur We Forest Three ?
Claude :
A. La discussion a été amorcée à l'issue de la dernière session et je pensais leur proposer d'explorer le ressenti de Petite lors de notre prochaine séance.
C. Un jeu solo, où sur option, à plus, pour jouer une chasse aux trois sorcières qui menacent notre communauté. La forêt peut être métaphore, mais sa progression est menace. Ancré dans le folklore des Philippines.
Thomas :
A. Cool
C. Oh là là ça a l'air passionnant. Ça colle tellement à Millevaux, et encore un jeu d'origine asiatique, ça ne mange pas de pain (ça me fait penser que le film Tropical Malady est un film de chevet et je voudrais beaucoup faire un replay de partie dans cette veine pour la version finale d'Inflorenza 2.) Et en plus, c'est dans la vague Sword Dream !
Alex joue Kaluna
Commentaires de Thomas après écoute :
A. Très intéressant de faire le lien entre l’almanach de Mr Clément et les feuilles poèmes de Central Park. Par ailleurs, on pourrait faire un lien avec les feuilles mémorielles de Métro…
B. Entre son truc de faire moisir le végétal et son nouveau passage du côté obscur, on dirait que Xavier cherche à se soustraire de l’horreur. Quelque part, je me demande si son trip avec les Pokemon lors de la partie de la Sorcière de l’Écorce ne procède pas du même échappatoire.
C. Sympa le retour de notre Boule d’Or fugueur : on doit pouvoir dire qu’il souffre de l’appel de la forêt comme dans le jeu de rôle Summerland :)
D. Le récit qu’Alex fait de son rêve est vraiment top.
E. Le fait de mentionner les noms véritables évoque les multiples vies de personnages voués à l’oubli
F. Utilise-tu des mécaniques de We Forest Three ou juste son ambiance générale ?
G. Très sympa de demander aux persos comment ils ont déjà pu se protéger du Titan Kalaung par le passé
H. Les diatribes du Titan Kalaung m’évoquent L’Apocalypse selon Millevaux :)
I. Le retour de l’esprit malin de Léo évoque la plongée dans les vies antérieures des personnages
J. Sympa de réciter la vanne sur les quatre saisons de Millevaux :)
K. Les délires de Xavier autour du sang, du bras-lame, de la corde de pendu et du briquet sont saisissants (bien que dans son esprit ça a plus de réalité que ce que tu lui en accordes, puisque tu valides ses propositions comme des visions et non comme des faits)
L. La sorcière est comme une version maléfique de la grand-mère de Boule d’Or :)
Claude :
B. Oui, de son propre aveu. Toutefois Xavier se plaint du manque d'adversité si il n'y a pas de monstres qui font peur.
C. Il me semble qu'Alex avait émis cette hypothèse (l'appel de la forêt, sans le lier au jeu qu'elle ignore).
F. J'ai commencé la session en utilisant les seules mécaniques de We Forest Three, et à mesure des apports des joueuses, je me suis contenté du décalage de canon produit.
K. Une pomme de discorde entre Gabrielle et Xavier. La toute puissance créatrice que s'accorde ce dernier est vécue comme un déni de jeu, une rupture de cohérence par le second.
L. Oui, c'est Baboushka de la session The Body /Hack ou la babayaga.
Cette dernière acception prendra plus de relief à priori dans Muddus.
Thomas :
C. L'appel de la forêt (The call of the Wild) est aussi un roman de Jack London (adapté en film cette année, avec Harisson Ford) sur un chien domestique enlevé et intégré de force comme chien de traîneau, puis devenant chef d'une meute de loups. ça pourrait très bien s'adapter à Millevaux :)
K. Je suppose que ça a été frictionnant aussi dans la partie Puok Krisd Sasanik [à paraître] où Xavier va jusqu'à sortir un fusil (à la balle décrite comme très létale) ainsi qu'un piano à queue de son œil :)
Claude :
C. Le premier roman qu'ait accepté de lire Xavier
Hors ligne
LE SECRET DE SAMAËL FAUCHIN
Vivants, morts, fantômes, mourants, marchent de concert dans la forêt qui s'assombrit. Un récit et une partie enregistrée par Claude Féry.
(temps de lecture : 3 min, temps d’écoute : 45 min)
Joué le 20/01/2020
Le jeu : Your Dead Friend, par Jeeyon Shim (jdr/gn en duo où deux amis se promènent un forêt la veille de la mort d'un d'eux)
netzanette, cc-by-nc
Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).
Bilan :
Nouvelle incursion en Millevaux avec Xavier cet après-midi, avec pour véhicule Sève la durée du oui.
Xavier joue Samaël Fauchin, je joue Tuuka.
Partie de courte durée, (45 minutes) que j'envisageai, a priori, douce et mélancolique, sous les auspices de Your Dead Friend et qui a changé de tonalité pour devenir sombre et horrifique, sans que nous n'ajoutions d'adversité extérieure, le personnage de Xavier était là pour cela.
Xavier a souligné que cela manquait d'adversité incarnée de monstre à affronter.
Je suis heureux des moments de convergence de la séance, des instants où une proximité, un embryon d'intimité s'est tissée entre nos personnages.
Mes premières instances étaient imprégnées de procédures issues de Your Dead Friend et j'ai pu voir les émotions naître sur le visage de Xavier.
J'ai mis en jeu mon poème et il a influé nettement sur l'interprétation de mon personnage, Tuuka.
Commentaires de Thomas :
A. Samaël Fauchin a-t-il un lien avec le premier personnage de Xavier, Samaël ?
B. « Xavier a souligné que cela manquait d'adversité incarnée de monstre à affronter. »
En effet, ce n'est pas ce à quoi on est censé s'attendre en jouant à Your Dead Friend. Xavier était-il informé à l'avance du caractère contemplatif du jeu ?
C. J'ai cru voir sur votre table des pierres glanées sur un champ de fouilles. Les avez-vous utilisées en jeu ?
fragment d'obus
Claude :
A. Non dans la phase de création mais il a établi des liens en session et après
B. Oui mais il en a décidé autrement après
C. Oui, les feuilles utilisées lors de la séance ont été créées à partir de celles-ci.
Commentaires de Thomas après écoute :
A. Un champ lexical forestier très vaste dans ce monologue d’intro
B. Où se passe cet épisode géographiquement ? Douaumont ?
C. Au début, tu dis qu’on ne sait pas qui va mourir des deux et je crois que ça minimise la portée de la proposition de Your Dead Friend (où, il me semble, on sait lequel des deux persos va mourir)
D. Xavier est bien à l’aise dans la narration partagée
E. Un opossum : encore une anomalie bio-géographique comme le panda roux :)
F. Super l’image du casque de bouc qui pleure trouvée par Xavier :)
Claude :
A. Cette introspection de Tuuka présente le décor et la situation initiale. L'idée que j'avais en tête c'est la forêt au cœur du parc naturel de Muddus.
Nous avions regardé avec Xavier un documentaire sur les forêts scandinaves.
J'ai tenté de décrire cette forêt en détails, comme si elle nous habitait.
C'est notre milieu. Nous vivons en son sein et elle vit en nous.
B. De fait en Suède. Toutefois je l'imaginait comme étant la forêt qui avait enseveli la partie urbaine qui jouxte la forêt noire actuellement, Ce sont ceux d'en-bas, l'un des groupes qui alimente dans mon imaginaire Little Hô Chi Minh Ville.
C. On en convient au départ effectivement. De fait en nous ménageant cette ouverture, Xavier a compté la mort de son personnage que je redoutais initialement et j'ai envisagé que mon personnage questionnait sa croyance et son interprétation de ses rêves prémonitoires et se trouvait convaincu jusqu'à ce qu'il trouve le saule que c'était lui qui devait disparaître et non pas son copain.
Que Xavier n'ait pas joué le jeu ne m'a pas empêché d'enrichir notre partie de certaines propositions de Your Dead Friend même si ce fut a minima.
E. Xavier avait flashé sur une photographie de ballade forestière de Kira Magrann juste avant de débuter la partie.
Hors ligne
MUDDUS
Ambiance délétère de film nordique pour ce premier opus qui amène l'horreur par petites touches. Un récit et un enregistrement par Claude Féry.
(temps de lecture : 5 min ; temps d’écoute : 2h03)
Joué le 02/02/2020
Le jeu : La Sorcière de l’écorce, un jeu de rôle suédois d’horreur folklorique et forestière par Pelle Nilsson et Johan Nohr.
Générique de la Sorcière de l'Écorce
Michiel van Nimwegen, cc-by-nc-nd
Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).
L'histoire :
Préparation non préparation de notre prochaine partie, une séance qui sera placée sous les auspices de la Sorcière de l'écorce. Elle se passe dans le parc de Muddus, notre prochain lieu de villégiature...
Quarante minutes pour définir à cinq la situation de départ et créer les personnages.
Xavier joue Oscar Millepois un collégien passionné par le dessin, tendance manga, en établissement Freinet. Alex joue Leslie Millepois, sa sœur, une jeune lycéenne passionnée par les écorchés et les technologies chirurgicales. Tous deux sont invités pour une excursion de 4 jours au parc National de Muddus en Suède par leur cousin Adrien Dumont, un jeune virologue qui conjugue une semaine de vacances familiales subventionnées par son C. E. avec un séminaire d'immunologie qui doit se tenir sur la dernière semaine de Juillet 2020. Il est joué par Mathieu.
Gabrielle joue Joris Karl Conan, un jeune écrivain, cousin germain d'Adrien qui s'est exilé en Laponie pour se consacrer à son écriture.
Fiction deux heures, Mathieu a du nous quitter au bout de 35 minutes.
Gabrielle joue Joris Karl Conan
Cela fait plus d'un an que Joris Karl est parti. C'est l'occasion de renouer avec la famille et de « remercier » son bienfaiteur de cousin qui lui a obtenu une résidence en mécénat dans l'hôtel arboricole non loin de Jokkmokk, payée par sa boîte de recherches médicales.
Pour les trois grands voyageurs, l'arrivée à Lulea est un soulagement après la chaleur étouffante de Paris.
Ils voyagent peu nombreux sur la ligne intérieure pour se retrouver dans le combi Volkswagen affrété par l'office du tourisme de Noorbotten avec l'asiatique dûment masqué qui a fait route depuis Paris avec eux.
Leur chauffeur, Stig Noorboyten, un Saami en costume traditionnel à la soixantaine bien sonnée, sera leur guide pour leur randonnée dans le parc de Muddus. Leslie l'a pris pour un vieux déguisé en père Noël.
Adrien a été rassuré par les moyens déployés par les compagnies aériennes pour s'assurer de l'innocuité de leurs passagers au regard de la pandémie du Corona virus.
Ils passent la nuit dans la cabane de Joris Karl. Les deux grands dorment par terre dans leurs sacs de couchage, le frère et la sœur dans le lit deux places.
Xavier joue Oscar Millepois
Au matin, le réveil tonitruant au gros son de rappeurs finlandais qui répandent leur Flow à la radio est une torture pour Leslie. Elle s'éveille avec le genou gauche bloqué. A l'examen, un immense hématome noircit sa cuisse et trois vilaines griffures purulentes entaillent son genou.
Joris Karl est maniaque et s'assure que toutes les issues sont hermétiquement fermées et remonte l'échelle de corde.
La boîte de céréales est éventrée et le sachet plastique plein de bave.
Cela n'empêche pas Oscar de manger avidement le reste.
Une martre peut-être ?
La blessure est trop vilaine et leur trousse à pharmacie trop légère.
Joris les accompagne chez Georg, un pharmacien qui parle un peu français.
Là le pharmacien soigne l'adolescente revêche. Piqûre antirabique, antibiotique large spectre, c'est sans appel une griffure d'ours noir.
Au moment de passer la carte européenne, Leslie apparaît dans le registre du pharmacien comme Leslie Ranso, âgée de 92 ans.
Ça lui parle Ranso.
Il n'est pas Sami lui même, mais par alliance avec sa défunte femme emportée par un cancer.
Et les Ranso sont célèbres pour avoir lutter contre la couronne pour maintenir leur droit à exploiter leurs terres au moment du tracé de la route et de l'extension du parc.
C'étaient pas des éleveurs de rennes, mais des vachers élevant des danoises. Dont une, la Marguerite a remporté de nombreux concours agricoles, une vache toute blanche, une albinos.
Puis le pharmacien a observé attentivement et de très près Leslie. Son regard lui dit quelque chose. Il demande par courriel à son fils éleveur de rennes qui lui renvoie une vieille photographie des enfants Ranso... Il y a un air de famille.
Shooté au cocktail de médocs, Leslie accompagne le petit groupe pour l'excursion qui débute par la visite de l'élevage de leur guide.
Ce dernier en profite pour faire l'article des produits de l'artisanat local.
Oscar lui achète un couteau et une pierre à aiguiser.
Il y laisse toutes ses couronnes.
Sur la pierre figurent des sigil.
Gabrielle joue Joris Karl Conan
Stig remarque que Leslie boitille et lui administre un remède Saami à base de plantes.
Départ de l'expédition dans la forêt d'épicéas.
Puis la tourbière.
Stig les invite à quitter le chemin de planches pour goûter la mélasse noire qui suinte d'un champignon blanc. Adrien et Leslie goûtent c'est pas mauvais.
L'asiatique se régale.
Il se présente : Kiyoshi Kurosawa. Il réalise des films d'horreur. Kiyoshi tousse.
Oscar lui demande si il est atteint par le virus. Il lui répond « of course not! », il insiste.
la marche reprend.
Kiyoshi reste près du guide.
L'atmosphère est tendue.
Ce dernier, l'air mauvais, observe un gars au bord de l'eau assis sur un siège pliant qui prend des notes sur un ordinateur portable.
Il se rue sur lui, l'insulte copieusement, casse son matériel et le bouscule.
L'inconnu s'éclipse sans demander son reste, abandonnant son matériel sur place.
Stig explique qu'il s'agit de Clas Vahn, un emmerdeur d'ufologue qui n'a rien à faire sur les terres tribales. Après une longue marche, ils parviennent à une soucoupe volante perchée dans un arbre qui leur servira de logis pour la nuit. Ce refuge ridicule, c'est à cause des conneries de Svahn...
Pas de feu, y a tout ce qui faut dans le refuge. Quartier libre jusqu'au lendemain 10h00.
Le Témoignage audio suivra.
Nous jouerons la suite la semaine prochaine.
Gabrielle joue Joris Karl
Commentaires de Thomas après lecture :
A. Rien qu'à lire la présentation des personnages, je sais que ça va tourner au film d'horreur :)
B. Très cool de voir une nouvelle partie centrée sur le folklore Saami :)
C. « Elle s'éveille avec le genou gauche bloqué. A l'examen, un immense hématome noircit sa cuisse et trois vilaines griffures purulentes entaillent son genou. » :
Ça sent la promenade somnambule qui se conclut par une attaque de zombie :)
D. « Stig les invite à quitter le chemin de planches pour goûter la mélasse noire qui suinte d'un champignon blanc. » :
Ça sent pas le bon plan :)
E. Kiyoshi Kurosawa : rigolo le caméo de l'auteur du film Charisma que tu avais cité comme inspi pour Millevaux :)
F. J'aime beaucoup l'altercation avec l'ufologue, je trouve ça assez typique d'un film d'ambiance aussi, on se demande qui est méchant, le guide ou l'ufologue.
I. Muddus, c’est un scénario de ta plume, pas un scénario officiel de Barkhäxan ?
Xavier joue Oscar Millepois
Réponse de Claude :
E. J'ai dialogué dans un spit English de bon ton et Alex m'a surpris en jouant l'impact sur son personnage de la rencontre avec un réalisateur de film d'horreur.
La suspicion de Xavier était jouée à fond et cela a donné une scène intense autour d'un malaise confus empreint de racisme et d'ostracisme. Nous sommes demeuré dans le jeu et l'interprétation mais ce fut intense
F. J'ai préparé ma session en effectuant des recherches sur Internet. Le groupe UFO Sweden existe tout autant que l'ufologue.
L'opposition de Saamis aux investigations de ces chercheurs est en revanche pure invention.
Toutefois je souhaite aboutir à une situation semblable à celle dépeinte dans Cœur de Tonnerre de Michael Apted.
Le personnage de Stig est le souvenir d' un activiste de l'AIM que j'ai rencontré en 2000. Je cherche à créer une tension autour des terres ancestrales du parc, pour que notamment l'événement aléatoire à base de bâche plastique prenne toute son importance.
G. L'autre moment intense était la scène de la pharmacie.
La blessure est un évènement aléatoire. Toutefois en le mettant en jeu, j'ai immédiatement établi un lien avec la menace qui plane sur le petit groupe de touriste.
J'ai joué en convergence avec les éléments matériels dont nous disposions. La photographie d'enfants de Muddus prise dans les années 40 et Alex face à moi.
Par coquetterie elle porte un cache nez et des gants. A ce stade j'ai réalisé que je n'avais pas pris de photographe de la séance.
Devant moi j'avais son regard intense, tout comme celui de la photographe des enfants que je voulais jouer.
Avec ma main j'ai mimé Georg isolant son regard et l'examinant attentivement. Puis il lui demande de la prendre en photo, ce que je m'empresse de faire.
La scène fut intense.
Alex a précisé que cela provoquait un malaise perceptible chez Leslie, en revanche elle s'amusait beaucoup de voir l'étrange s'installer à notre table.
H. La pierre à aiguiser avec sigil est un apport, parmi d'autres de Xavier. Celui-ci a cependant interpellé Gabrielle qui a oublié qui en était l'auteur et y perçoit un lien trouble avec l'identité trouble des enfants saami français
I. De mon cru
Alex joue Leslie Millepois
Commentaires de Thomas après écoute :
A. C'est fou comme entendre un PNJ parler en anglais peut être immersif.
B. Cette introduction très low-key ressemble vraiment à du jeu de rôle de tourisme :)
Hors ligne
VENGEANCE SYNDROME
Suite du scénario Muddus. On poursuit l'ambiance de polar nordique, sur fond de vengeance et de contamination. Un récit et un enregistrement de partie par Claude Féry !
(temps de lecture : 5 min ; temps d'écoute : 22 min + 1H55)
Joué le 08/02/2020
Le jeu : La Sorcière de l’écorce, un jeu de rôle suédois d’horreur folklorique et forestière par Pelle Nilsson et Johan Nohr.
Playlist La Sorcière de l’Écorce
Cet après-midi avec Alex, Gabrielle et Xavier nous jouerons la suite de notre partie de La Sorcière de l'écorce, intitulée Muddus.
Lire/télécharger le mp3 (partie 1)
Lire/télécharger le mp3 (partie 2)
Thomas, cc-by-sa
Toutes les photos suivantes sont de Claude Féry (par courtoisie).
L'histoire :
Alors que le ciel puise la lumière pour la répandre vers les étoiles, Leslie prépare le repas du soir : renne et purée lyophilisée. A la demande d'Oscar elle prépare ensuite des gaufres. La soucoupe suspendue dans les arbres est agréable et fonctionnelle. Ils trouvent du lait, de la viande, des céréales de quoi se sustenter ce soir et déjeuner le lendemain.
Oscar est ravi des couchettes qui ressemblent à celles de Tintin dans l'album objectif lune.
Il dessine et négocie une gaufre d'avance sur le petit déjeuner. Adrien s'endort sur son téléphone en tentant de lire la documentation téléchargée.
Joris Karl s'endort à demi sur ses notes et retrouve la photographie d'une obscure gravure glissée comme marque page dans son carnet, une représentation d'un Svarog en puissance.
Kiyoshi, après avoir contemplé longuement la forêt, par la baie qui éclaire le séjour, se couche aussi.
Le sommeil fuit Leslie qui repousse une attaque somnambule d'Oscar vers la pile de gaufre.
Il renonce et se rendort par terre avec la BD de Tintin rabattue sur la tête.
Le froid et un radio-réveil Bang & Olfusen les réveillent. Oscar danse comme un fou sur le rap Lapon et Kiyoshi retient le geste de Leslie qui s' apprêtait à couper la chique à la Saami revendicative pour profiter de son Flow.
Adrien beugle. « c'est quoi ce binz ! » désignant la bâche plastique qui remplace la porte oblongue de la soucoupe. En s'approchant il butte sur une bonbonne métallique qui achève sa course contre le chambranle de la porte. Inscriptions cyrilliques sur fond anodisé.
Non sans mal il arrache la bâche agrafée depuis l'extérieur, la porte sagement posée sur le perron.
Kiyoshi l'aide à revisser les charnières et replacer la porte sur ses gonds. Une visseuse électrique gisait dans l'herbe sous l'échelle de corde.
Leurs narines sont emplies d'une odeur de cramé. Ils cherchent partout le départ de feu, sans succès.
Kiyoshi demande à goûter une gaufre. Leslie l'y autorise. Oscar et Adrien se joignent à lui.
C'est dégueulasse, pâteux et ils ont la bouche desséchée après une bouchée.
Un mince film gras et jaunâtre recouvre tout.
Il est six heures et c'est n'importe quoi beugle Adrien hors de lui.
Il est fiévreux, inquiet désorienté.
Il chuchote à l'oreille de son cousin un discours décousu à propos de ses lectures de la veille.
Son débit est si rapide, qu'il perd le contrôle de sa voix et attire l'attention des gamins.
L'OCP n'a pas un stock suffisant pour faire face à la pandémie et envisage de diffuser des placebo en masse. Son séminaire c'est une réunion de crise et on a cherché à les gazer ! Et l'autre Kiyoshi il est atteint. On est des putains de rats de laboratoire.
Puis après sa diatribe il est saisi d'un vertige. Son bras est bloqué. Leslie l'examine, pas de griffures, mais il est brûlant de fièvre.
Elle lui donne un de ses cachets.
L'eau ne fonctionne plus dans le chalet.
Plus de réseau, non plus et l'application boussole est folle !
Adrien clame qu'il faut partir immédiatement.
Kiyoshi est pris d'une nouvelle quinte de toux.
Il descend une carte du parc qui était punaisée dans leur chambre.
Nouvelle quinte de toux.
Kiyoshi déclare qu'il doivent se séparer maintenant.
Dans la main il tient une photographie d'une jeune femme qu'il contemple d'un regard triste, presque larmoyant, puis reporte son regard sur les traces laissées par des motos.
Joris Karl l'interroge.
Kiyoshi recherche sa future femme, Soeng, disparue au début du mois dans le parc. Elle y était venue pour mûrir sa décision sur sa proposition de mariage.
Joris Karl traduit les explications de Kiyoshi.
Adrien en conclut qu'il faut l'aider, qu'il était peut être la cible de la tentative d'empoisonnement.
Kiyoshi les avertit de ses intentions.
Il sort un revolver de sous sa chemise.
Ils décident de suivre les traces des motos en silence en essayant de surprendre les kidnappeurs.
Ils marchent jusque midi d'un bon pas, hors piste. Ils ne s'arrêtent que pour grappiller des myrtilles.
A la pause, Adrien s'approche de Leslie.
Il frissonne, il est glacé.
Il est incohérent. Il ne sait plus qui est qui.
Il demande à Leslie, qu'il appelle Soeng de ne pas oublier leur promesse de bonheur de décembre. Il ne reconnaît plus Oscar, puis s'offusque qu'on lui réaffirme des évidences.
Leslie lui administre une bonne dose de ventoline.
Ils reprennent leur progression et Leslie s'attarde pour récolter des simples. Un bon stimulant cardiaque dont elle enduit la lame de son scalpel et rempli une seringue.
En fin d'après midi, à la lisière d'une forêt de bouleaux, un campement sur les berges.
Deux motos sont à l'arrêt et un solide gaillard tisonne un feu, leur tournant le dos.
Ils s'approchant en silence, Kiyoshi en tête, qui braque son arme sur le type.
A cinq mètres de leur cible, Oscar laisse choir sa pierre à aiguiser sur les graviers. Le gars, barbu, massif se retourne et porte la main à sa ceinture tout en contournant le barbecue pour le placer entre eux et lui.
Kiyoshi crie « don't move! freeze! »
Le gars lève la main gauche en signe de reddition et balance quelque chose dans le feu.
Joris Karl bondit et répand le contenu du barbecue au sol pour écraser une poignée de cartouches de chasse. Leslie en profite et lui plante une seringue de sa préparation.
Le gars tressaute au sol près des motos.
Alors, de derrière les buissons, surgit le second, une immense brute barbue, au teint sombre, brandissant une kalach.
Avec un accent épais il lâche
« Nu Pachli Don't move Drop your weapons! »
Kiyoshi hésite
Joris Karl bondit et se jette sur lui pour le déséquilibrer.
Il reçoit un méchant coup de crosse au visage et entend résonner les cloches de Notre-Dame, retour express à Paris et plongeon dans la boue.
Aussitôt, Oscar tente de le planter de sa lame achetée à Stig. Il sectionne le ceinturon, mais dans un mouvement tournant la brute lui assène un méchant coup de pied à la mâchoire qui l'envoie valser. Leslie s'apprête à se jeter sur lui munie de son scalpel, lorsque son tympan droit explose en même temps que l'épaule gauche du mercenaire.
Il s'effondre et gémit faiblement alors que le sang noircit en étoile sa tunique camouflée.
Leslie se ressaisit et tente de comprimer la blessure.
Kiyoshi le secoue désespéré
« where is my wife? »
Elle y parvient brièvement. Pour le booster Adrien lui administre de la ventoline.
Le gars est mourant
« You are all dead now! If the virus don't leave us with you the Sentinel will kill you!  »
Alex joue Leslie, Gabrielle joue Joris Karl
Bilan provisoire :
J'ai joué le personnage de Mathieu, non comme un figurant mais selon un mélange entre les réactions qui seraient les siennes propres en de telles circonstances et celles du personnage.
J'ai tenté de jouer Kiyoshi sur une ligne mélancolique et dramatique.
J'ai utilisé une fraction des remarques de la partie précédente pour jouer en miroir, même si je conserve l'histoire de père fouettard pour plus tard.
Alex était beaucoup plus actif qu' à l'accoutumée.
Dans la mesure où nous avons pleinement joué la barrière des langues, je craignais que Xavier se sente un peu délaissé.
Après la partie il m'a dit que c'était super de jouer comme ça en convergence avec son personnage.
Xavier a déclaré qu'il avait A D O R É et Alex a apprécié la forte adversité (beau sourire illuminant son visage).
Une partie très agréable !
Claude
Commentaires de Thomas :
A. Quelle est le métier de l'homme barbu avec des chaînes sur la photo en noir et blanc ?
B. Merci pour ce récit très complet, ça a dû te prendre du temps de le rédiger ! J'aime beaucoup le côté polar.
C. Est-ce que « Sentinel » fait référence aux Sentinelles, les maletronches dotés de sens hyper-développés et utilisés comme « chiens de chasse » ?
D. Muddus est davantage improvisé et suit donc plus les directives du seul livre de base que Grätmyrsban, qui était un scénario un peu plus construit. Sur lequel des deux modes va ta préférence ?
Xavier joue Oscar Millepois (C) par Claude Féry
Claude :
A. C'est le père fouettard (Hans Trapp dans l'est)
C. La sentinelle du gang des quads de Barbaque ! et Ballade pour un missile.
D. Muddus, en grande partie aussi parce que les personnages découvrent la Suède tout comme les joueuses.
Thomas Munier :
C. Ah oui alors c'est bien ça.
Alex joue Leslie, Gabrielle joue Joris Karl
Hors ligne
LA CÉRÉMONIE DE L'OURS
Le final du scénario Muddus. Quelques rires, de l'action, de l'étrange et quelques scènes effrayantes, avec un père fouettard vraiment trop méchant et une histoire de couloir obscur... Un enregistrement de partie par Claude Féry.
(temps d’écoute : 3H08)
Joué le 09/02/2020
Le jeu : La Sorcière de l’écorce, un jeu de rôle suédois d’horreur folklorique et forestière par Pelle Nilsson et Johan Nohr.
Travis, cc-by-nc
L'histoire :
Cet après-midi nous jouons à La Sorcière de l'écorce la suite et conclusion de Muddus
Quatre heures de jeu pour aboutir à une scène finale de cérémonie de l'ours, selon les rites ancestraux Saami.
Belle partie.
Parties précédentes du scénario Muddus :
1. Muddus *
Ambiance délétère de film nordique pour ce premier opus qui amène l’horreur par petites touches. Un récit et un enregistrement par Claude Féry. (temps de lecture : 5 min ; temps d’écoute : 2h03)
2. Vengeance Syndrome *
Suite du scénario Muddus. On poursuit l'ambiance de polar nordique, sur fond de vengeance et de contamination. Un récit et un enregistrement de partie par Claude Féry ! (temps de lecture : 5 min ; temps d’écoute : 22 min + 1H55)
Note du 29/02/2020 :
Quand la réalité rencontre notre fiction
Samedi, après notre partie, j''ai pris connaissance de l'arrêté préfectoral de phase 2 Covid 19 emportant la fermeture des établissements scolaires.
Et non la réaction d'Alex et Xavier ne fut pas de sauter à pieds joints sur le lit sur lequel ils discutaient, en beuglant l' école est finie, non...
Alex s'est tourné vers moi
« C'est vrai, c'est pas une histoire ? Non mais dans la vraie vie, c'est pas vrai, non ? Dis ? »
Pour mémoire, dans notre dernière partie en date de La Sorcière de l'écorce, je faisais l'hypothèse de l'extension de la pandémie au-delà de tout contrôle.
Thomas :
Bon, j'espère que vous avez assez de conserves dans votre abri anti-atomique :)
Claude :
Nous avons fait des provisions, mais dès samedi les rayons nourriture des supermarchés du coin avaient été dévalisés...
Commentaires de Thomas après écoute :
A. « Tu sens la chair noire frissonner sous ton doigt. »
Ah ah on dirait que la viande de l'ours est de la Viande Noire ;)
Hors ligne
Pages : Précédent 1 … 6 7 8