LES MARAIS CORROMPUS DE LA SOMME.
Le texte de la campagne jouée par forum enfin reproduit en version accessible !
illustration : Caspar Friedrich, domaine public
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LE GOBELIN ET LA MANTE
Plongée dans une ambiance de féerie noire avec cette partie au débotté ! Un CR par Joachim.
Jeu : Inflorenza, héros, salauds et martyrs dans l'enfer forestier
Joué le 11/03/2017 au Colloque Bob le Rôliste
crédits : Steve Corey, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com
Hello Thomas,
Comme promis je te fais un petit compte-rendu de la partie d'Inflorenza que l'on a pu jouer grâce à tes fiches (et bien sûr grâce au fait que tu ais crée le jeu).
Comme on jouait avec les règles dans ma tête (un peu rafraîchie par ton intervention, merci), je l'ai un peu tordu par inadvertance, le principal écart est que nous ne nous sommes pas ajouté de phrase à la clôture de nos premières instances respectives.
Nous avons joué en mode Carte Rouge sans aucune préparation, on a laissé couler au fil de l'eau alors je vais faire un compte-rendu instance par instance, cela sera plus parlant.
Joueurs :
Isabelle, Émilie, Sylvain et Joachim : tous des joueurs de jeu de rôle vétérans.
Joachim joue ici le rôle du confident, c'est le seul à connaitre les règles mais il partage sa connaissance de l'univers de Millevaux avec Émilie qui a eu l’occasion de jouer à Millveaux sombre.
Début du jeu :
Après une rapide introduction aux règles et à l'univers de Millevaux et de ses concepts premiers, Joachim ouvre le bal afin de montrer l'exemple.
Joachim
Je commence par une description physique de mon personnage. Je mesure tout juste 1m20, j'ai la peau grise à tendance verdâtre et écailleuse et des oreilles en pointe dressées vers le ciel. Le crâne décharné, deux yeux de chats et une mâchoire agrémenté de dents pointues viennent compléter le tableau de l'aspect repoussant et étrange de mon personnage.
Je ne sais pas ce que je suis mais je me reconnais comme différent des autres personnes que j'ai croisées. N'ayant jamais vu de personne qui me ressemble, j'en conclus que j'ai perdu mon peuple et je parcours donc la forêt en espérant trouver les miens ou des gens pouvant me donner des informations.
C'est ainsi que j'arrive dans une immense clairière au milieu de la forêt. C'est un petit havre de paix qui s'est monté autour d'un seul bâtiment : une auberge. Les gens vont et viennent dans la clairière, y installent des tentes et des échoppes plus ou moins pérennes. C'est un lieu d'échange et de rencontre.
J'écris sur ma feuille : Je veux retrouver mon peuple.
Émilie
Elle suit Joachim depuis de longues semaines maintenant. Sans se faire voir, telle une ombre. Elle connaît une partie de la vérité sur les origines de ce dernier et sur son peuple. La tribu d'Émilie et celle de Joachim sont en guerre depuis longtemps et elle sait que si jamais Joachim rejoint un jours les siens, une grande catastrophe arrivera. C'est sur cette idée là qu'elle le suit à l’intérieur de la clairière.
Elle écrit sur sa feuille : Je veux empêcher Joachim de retrouver son peuple.
Isabelle
C'est une centaure mi-femme (pour le tronc) et mi-mante religieuse. D'un naturel avenant, elle croise Gzoubli (le personnage de Joachim qui gagne un nom à cette occasion) perdu dans la foule de la clairière. Avec une candeur naïve, elle fait la conversation au petit être qui se révèle vite aussi crédule que maladroit. Voyant là un moyen de l'exploiter, lui et les siens, elle se présente à lui comme le messie qui pourra le guider vers son peuple. Elle se fait alors appeler Orchidéa. Afin de garder le gobelin docile et en faire un allié au plus vite, elle invite la créature dans la taverne pour boire une bière de sa poche.
Elle écrit sur sa feuille : Je veux convertir le peuple des gobelins à ma religion.
Sylvain
Sylvain est un chef de meute, et plus précisément le chef d'une bande de pillards plaçant l'honneur avant toutes chose. Lui et sa bande ont repéré la clairière il y a peu et sont en train de faire du repérage pour piller toutes les ressources qui pourraient être utiles à la survie et brûler le reste. En chef réfléchi et consciencieux, il organise ses hommes en vue d'une attaque qui aura lieu dès la nuit tombée.
Il écrit sur sa feuille : Je veux piller le campement.
Gzoubli
A la taverne, le gobelin et son nouveau messie discutent chaleureusement. Le gobelin fait à nouveau montre de sa crédulité sans faille et anime la conversation de sa voix nasillarde et haut perchée. Il découvre également la bière, breuvage qu'il n'avait jusque là encore jamais goûté. Il devient vite accro à la boisson au houblon au point de devenir agressif si l'on lui en refuse. Légèrement circonspect, il demande tout de même à son messie de quelle manière cette dernière sait où retrouver son peuple. Cette dernière lui répond qu'elle a obtenus l'information d'un marchand itinérant il y a peu.
Je décide de clôturer l'instance sans conflit.
J'ajoute sur ma feuille : Je suis accro à la bière.
Élisabeth
Assise à une table non loin, Élisabeth écoute d'une oreille attentive la conversation. Elle profite d'un moment calme pour s'immiscer dans la conversation en faisant une conversation qui stupéfie ses deux interlocuteur : le marchand qui a donné les informations à Orchidéa est un menteur. Elle connaît bien le marchand et connaît parfaitement sa propension au mensonge et à la tromperie. Elle propose donc de guider la troupe dans la "bonne" direction.
Élisabeth décide également de clôturer son instance sans conflit.
Elle écrit sur sa feuille : Je me souviens que le marchand est un menteur.
Orchidéa
Comme le soir ne va pas tarder à tomber, Orchidéa propose à ses compagnons de faire un petit tour dans le campement, discuter avec les gens et profiter de l'ambiance. Elle a tout de même au préalable acheté une petite gourde de bière pour motiver Gzoubli au cas ou.
Orchidéa clôture rapidement son instance sans conflit.
Elle écrit sur sa feuille : Je suis de bonne humeur.
Sylvain
La nuit est enfin tombée sur la forêt et c'est à présent le moment de l'attaque. Après un dernier mot pour ses hommes, Sylvain lance ses troupes à l'assaut. L'infanterie attaquera le campement par le flanc ouest et des archers se tiennent sur le flanc est pour maintenir la pression. Sylvain ne prend pas part directement au combat et agit en arrière-garde pour diriger les troupes.
Avec l'accord des autres joueurs, Sylvain clôture son instance sans conflit.
Il écrit sur sa feuille : Je supervise les opérations.
Gzoubli
La tension monte dans le campement et c'est la panique générale. Gzoubli, abruti par l'alcool mais refusant de céder à la panique, s'empare d'une épée proche tombée au sol et entreprend de protéger ses deux camarades en attaquant tout pillard qui approcherait trop près.
Il met en jeu ses deux phrases Je veux retrouver mon peuple et Je suis accro à la bière car il refuse de mourir avant de retrouver les siens et que la bière la galvanise dans son combat. Ses pupilles deviennent rouges et une rage sanglante s'empare de lui, il se bat comme un diable.
C'est une réussite grâce un dé de puissance, il ajoute : En moi se cache un pouvoir insoupçonné.
Élisabeth
La jeune femme refuse également de se laisser faire tandis qu'une horde barbare attaque. Elle brandit son arme et se lance à l'assaut de la troupe et entreprend de la mettre en fuite.
Elle annonce à sylvain qu'elle espère chasser toute la horde et lui avec. Sylvain refuse de se voir hors jeu si vite et propose un duel avec pour enjeu : La troupe est mise en déroute VS la mort de Élisabeth. Cette dernière accepte.
Chaque joueur met en jeu ses deux phrases pour mettre en avant sa volonté farouche d'en découdre avec l'ennemi. Élisabeth se sert du fait que le marchand est un menteur pour révéler que les armes et armures achetées par la horde auprès de ce dernier sont de mauvaise qualité, voire défectueuses, elle est également aidée par Orchidéa.
Lors du conflit, les deux joueurs obtiennent uniquement des dés de souffrance, les deux joueurs vont donc perdre leurs conflits. Le personnage d'Élisabeth arrive, grâce à un talent de combattant inouï et aidé par sa compagne insectoïde, à terrasser la majeure partie de la horde mais elle est gravement blessée durant le combat et se retrouve à l'article de la mort. Son personnage est hors jeu mais elle garde les deux dés de souffrance pour son prochain personnage. Sylvain écrit : Mes pillard survivants s'enfuient.
Orchidéa
Une fois le combat fini, Gzoubli est toujours fortement agité. Orchidéa parvient à le calmer en le raisonnant et en lui donnant quelques gouttes de bière. Elle a aperçu au loin Sylvain malgré tous ses efforts pour rester discret. Elle décide d'aller le voir pour lui proposer sans rancune de les accompagner car ses talents de combattant et surtout de chef sont grands. Sylvain, surpris de s'être fait repérer et d'avoir perdu ses hommes, refuse hargneusement.
C'est donc sans conflit qu'Orchidéa clôture son instance.
Elle écrit sur sa feuille : Je sais calmer les gobelins berserkers.
Sylvain
Dépité de la défaite qu'un groupe de trois personnes a infligé à ses hommes, Sylvain prend la responsabilité de la débâcle sur son dos. En effet, en tant que chef de guerre de la bande, il était de son devoir de gérer la troupe pour éviter se genre d’incident. Ayant perdu tout son honneur face à ses hommes, il donne son rang de chef à son premier commandant et part à la conquête d'un fait d'arme qui le refera monter dans le rang social de son clan. Persuadé qu'Orchidéa est la raison de sa défaite, il décide de ramener sa tête pour laver son honneur. Il suit donc le duo discrètement pour attendre le moment propice à une attaque surprise.
Il écrit sur sa feuille : Je dois retrouver mon honneur.
Gzoubli
Le gobelin et la femme-mante religieuse voyagent dans la forêt en direction de l'ouest où se cache peut-être le peuple de Gzoubli. La nuit tombe cependant bien vite et le petit être révèle une de ses afflictions : il est totalement aveugle dès que la luminosités baisse. Son messie lui propose de s’arrêter pour la nuit mais, trop fier ou trop idiot, il refuse.
Un conflit simple s'engage pour savoir s'il réussit à passer la nuit sans trop se faire mal sur l’environnement.
Le joueur met en jeu sa phrase Je veux retrouver mon peuple et Je suis accro à la bière. En effet, il n'aura pas de repos tant qu'il ne sera pas avec les siens et la porteuse de bière mène le chemin. C'est deux souffrances qui sortent, le pauvre gobelin se prend tous les arbres, toutes les racines et les moindres crevasses durant toute la durée de la nuit. Au matin, le joueur écrit la phrase : Je suis plein de bleus et d'ecchymoses.
Émilie
Émilie n'a plus de personnage, elle s'en recrée d’abord un avant tout. Elle décide de jouer un des hommes de Sylvain qui lui est resté fidèle et elle propose à son ancien chef de l'accompagner et de l'aider à laver son honneur. Un peu à contre-cœur, Sylvain accepte la requête.
Avec les deux dès de souffrance qu'elle avait gardés de sa rencontre précédente, Émilie écrit trois phrases en rapport avec son personnage : Je veux aider Sylvain à retrouver son honneur. J'ai été blessé au combat. Je suis hanté par toutes mes victimes.
Orchidéa
Le matin s'est levé depuis moins d'une heure quand les deux compagnons arrivent dans une immense clairière de champions géants. Le lieu est féerique, de petites libellules-fées volent autour des mycéliums gigantesques et une intime clarté passe au travers des branchages. Sur le chapeau d'un des champignons, un chaton chante une chanson triste à pleurer. En voyant les deux intrus arriver, il saute de son perchoir et s'approche des nouveaux-venus. N'écoutant que son estomac, Orchidéa dévore la tête du pauvre animal. Grand mal lui en a pris. Sous un des champignons de la clairière se reposait la mère du petit. Un chat gigantesque se dresse alors devant l’impudente. Voyant que la menace est trop grande, l'insectoïde tente de fuir mais les libellules-fées se massent en un mur devant elle.
En mettant en jeu sa phrase Je veux convertir le peuple des gobelins et Je suis de très bonne humeur, la joueuse tente de clôturer son instance par un conflit simple. Malheureusement, deux dés de souffrance tombent. Orchidéa déploie ses ailes et saute par-dessus le mur enchanté mais se réceptionne mal et tombe le long d'un ravin, elle est blessée à la cheville. Elle propose à son compagnon de route de faire une pause dans La clairière derrière eux. Elle écrit sur sa feuille : J'ai une de mes trois chevilles cassée.
Sylvain
Le joueurs se sont mis d'accord pour dire que ce serait la dernière instance de la soirée et Sylvain veut partir en beauté. Il a filé le groupe toute la nuit mais n'a pas assisté à la fuite d'Orchidéa et de Gzoubli dans la clairière. Il les retrouve endormis en bas de la ravine et décide de tuer Orchidéa dans son sommeil mais la joueuse refuse de voir éliminer son personnage. Dans un revirement de situation inattendu, alors que la lame allait frapper le corps de la femme endormie, le chat-champignon géant de la clairière arrive en trombe dans le dos de Sylvain. Tous les joueurs (à l’exception de Gzoubli qui a le sommeil lourd) n'ont plus d'autre choix que de s'allier pour combattre le monstre.
Dans un défi simple qui voit la mise en jeu de pas moins de neuf phrases, le monstre se fait terrasser par les effort conjoints des deux hommes de clan et du messie gobelin. Sylvain lui récupère la tête et barre sa phrase Je dois retrouver mon honneur. Les deux autre protagonistes qui ont surpassé leurs douleur pour sauver leurs vies barrent J'ai été blessé au combat et J'ai une de mes trois chevilles cassée.
Fin
Voilà, le résumé est terminé, c'est un peu long, désolé :)
Je voulais juste te remercier encore une fois de nous avoir permis de jouer à ce super jeu. J'ai fait une autre partie à six la semaine suivante et on s'est tous bien marrés encore une fois (une histoire dans un Auchan, à base de caddies vivants, des horlas montés sur roues).
Je te dis donc à une prochaine fois avec plaisir.
Retour de Thomas :
Un grand merci pour ton compte-rendu !
C'est intéressant de voir que vous êtes partis sur des persos qui donnent une tonalité très dark faery à la partie, qui ne m'a pas forcément été si souvent donné à voir (je pense quand même à une de mes parties, L'Archipel d'Eireann).
Pour les règles, je crois en effet relever deux ou trois entorses à la lecture du compte-rendu. Cela n'a rien de grave du moment que vous arrivez à vous amuser (ainsi le fait d'omettre de rajouter une phrase à la fin de la première instance si on clôture sans conflit, c'est bénin si tout le monde est logé à la même enseigne, d'autant plus que l'équilibrage est une chose secondaire à Inflorenza), je me permets juste de les relever pour information :
+ Quand Elisabeth et Sylvain s'affrontent par horde interposée, et que les deux obtiennent de la souffrance (en nombre égal), tu es parti sur une conclusion en demi-teinte. Les règles du livre de base préconisent que dans ce cas d'ex aequo, l'avantage aille au personnage qui a lancé le conflit (je dirais dans ce cas là plutôt Sylvain puisque c'est lui qui lance sa horde à l'assaut). Ceci dit, la conclusion en demi-teinte est très convenable, et si ma mémoire est bonne, c'est bien possible que c'est moi qui te l'ai conseillée, avec possibilité de relancer les dés si cette solution est insatisfaisante. Trancher les ex aequo par une conclusion en demi-teinte ou en double choc est une option que je mettrai dans Inflorenza 2.
+ Dans le dernier conflit (contre le chat-monstre), trois personnages affrontent le chat dans un conflit simple et tu dis qu'ils lancent 9 dés. Normalement, on se limite à 6 dés par camp (donc 6 dés lancés si conflit simple, 12 dés si conflit duel). En lançant 9 dés, tu as une probabilité monstrueuse d'avoir deux sacrifices, ce qui entraîne contamination de la main et donc perte de 9 phrases pour le groupe :)
+ A l'issue de ce conflit à 9 dés, tu annonce que chacun des trois personnages barre une phrase. ça veut dire que tu as compté autant de phrases à barrer que de dés de sacrifice, ou alors tu as rationné (c'est-à-dire pas plus de phrases barrées que le nombre de sacrifices ou le nombre de personnages). J'en déduis que tu as ignoré la règle de la contamination : si dans une main il y a au moins deux dés de sacrifice, ils contaminent toute la main : tous les autres dés deviennent des dés de sacrifice, et il n'y a aucun rationnement. Je pense donc que quand vous avez lancé 9 dés (je rappelle que vous auriez dû vous limiter à 6 dés), tu as obtenu au moins trois dés de sacrifice, qui auraient dû contaminer toute la main, donc 9 dés de sacrifice, soit 9 phrases à barrer, ce qui est énorme. C'est d'ailleurs bien pour ça que j'ai limité à 6 dés par camp :)
Réponse de Joachim :
Ensuite pour les petits points que tu as abordés, je n'ai pas su trop quoi faire en effet lors de la double défaite Elisabeth vs Sylvain. Je n'ai tout bêtement pas pensé à appliquer les règles d’égalité (pourtant présente dans Nanoflorenza) car dans ma tête elles s'appliquaient pour les réussites à égalité.
Pour les neuf dés, en effet la règle des 6 dés m'était sortie de la tête mais le risque convenait bien aux autres joueurs car il s'agissait du dernier tour. Par contre en effet deux sacrifices sont bien tombés lors du jet (1;8;11;2;7;4;7;10;4), ce qui a contaminé la main. Mais une fois de plus, pris dans le feu de l'action, nous avons appliqué la règle du rationnement sans s'apercevoir qu'elle ne s'appliquait pas aux dés de sacrifice. Aucun des personnages n'aurait été éliminé si nous avions fait plus attention mais la victoire aurait été entachée de plus gros... sacrifices :)
Quand à l'ambiance de la partie, j'ai ouvert la présentation du jeux en dépeignant Millevaux aussi fidèlement que possible mais surtout en leurs disant que dans Inflorenza, c'était eux les maîtres. Tous les joueurs autour de la table ayant une attirance particulière pour la dark fantasy ou l'epic fantasy (celle de D&D/Pathfinder par exemple), la partie a très vite pris ce virage. Et puis, il faut dire que j'ai bien aidé en présentant mon personnage comme une petite créature grise au oreilles pointues et à la voix aussi aiguë que nasillarde.
La partie que j'ai jouée la semaine suivante était elle sur un tout autre registre et encore une fois, on voit l'importance de la première instance. Tout de suite, le centre commercial a été placé et les joueurs se sont donc très vite greffés sur le post-apo horrifique. D'autant plus qu'un des joueurs interprétait le horla du centre commercial.
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GINNY ET SES AMIES
Quand Millevaux rencontre le journal de Bridget Jones ! Un théâtre et un CR par Eugénie.
Le contexte : à l'occasion du podcast 1 000 façons de jouer à Inflorenza, on a réalisé que nos parties d'Inflorenza n'étaient pas particulièrement comiques. Arjuna nous demandé si on se voyait jouer une partie « à la manière de Bridget Jones ». D'où l'essai...
crédits : camillej, Chris Moody, dru, Euan, martin Labar, robert sonart, licence cc-by-nc, galerie sur flickr.com
On joue en Classic Carte rouge (je fais confidente)
Nous sommes 3 joueurs (dont une joueuse qui n'a jamais joué à Inflorenza)
3h environ de jeu (brief et worldbuilding inclus)
partie via hangout avec quelques soucis de déconnexion en cours de jeu
Je remets le théâtre ici.
LONDON'S GIRLS
Londres contemporain, dans un monde où se manifestent les prémisses de Millevaux, pour une comédie romantique à l'anglaise façon Bridget Jones.1. Développement personnel : coaching, yoggi tea, « sois qui tu veux », « vis tes rêves », auto-pression, culte du corps, manies, illusions, dévalorisation de soi, mégalomanie, obsessions
2. Mémoire : promesse, rancœur, liens familiaux, journal intime, pense-bête, note-pour-plus-tard, trou de mémoire, étourderie, réminiscence
3. Nature : ficus à croissance rapide, moisissures dans le frigo, racines dans les canalisations, branches à travers l'open space, scolopendres, insectes, écureuils, pigeons, pollens aux effets incongrus, invasion de géraniums
4. Malchance : quiproquo, coïncidence, lose, malentendu, tenue inappropriée, gaffe, malaise, maladresse, gêne, moment honteux, parler sans réfléchir
5 Egregore : souhait inconscient, vœu à double tranchant, secret dévoilé, pacte, émotion envahissante, contamination de la réalité par les sentiments
6. Job : vie de bureau, open space, collègues (compatissant, dragueur.se, weird), service, réunion, boss, séminaire, gros client, fête de la boîte, humiliation, promotion, succès
7. Quotidien : vaisselle empilée dans l'évier, linge sale éparpillé, chat à garder, pyjama Mickey, body gainant, boire des verres, amis indéfectibles (copine moche, colocataire weird, star sur le retour), voisin voyeur
8. Pression sociale : mariage, célibat, divorce, sauver les apparences, parents intrusifs, rivalité, réputation, commérages, St Valentin, repas de Noël, Garden Party annuelle de tante Rosamund, réussite, attentes
9. Comédie : dramaqueen, bourreau des cœurs, fausse confidence, perfidie, séduction, trahison, mensonge, dissimulation, fidélité, confiance, sincérité
10. Amour : [love interest] inaccessible, amour romantique parfait, passion à sens unique, tendresse, trouble inavoué, amour-propre, désir, triangle amoureux, séduction, réconciliation
11. Pulsion : orgueil, avarice, luxure, envie, paresse, gourmandise, colère, prudence, tempérance, courage, inconscient, chagrin
12. Corps : sexe, plaisir, désir, promiscuité, beauté, silhouette parfaite, kilos en trop, cernes, épilation, maladie, addiction, alcool, cigarettes, santé, tomber enceinte
La forêt
Les parcs se sont transformés en forêt et débordent de leur périmètre. Certains arbres de ville ont pris une ampleur remarquable et crevé des buildings de part en part. Les rues sont parfois encombrées de racines et des massifs municipaux s'échappent des plantes à croissance rapide. Imperturbables, les londoniens continuent de vaquer à leurs occupations et tentent d'ignorer l'intrusion de la forêt dans leur quotidien.Le syndrome de l'oubli
Les effets commencent à peine à se faire sentir : maux de tête, trous de mémoire chroniques, incapacité à reconnaître un visage ou un lieu familier, étourderie généralisée sont devenus des maux courants dont tout le monde se plaint plus ou moins. Pour lutter, les londoniens recourent aux pense-bêtes, aux organigrammes complexes, aux notes-pour-plus-tard, aux journaux intimes, aux listes...L'égrégore
La trame psychique, la somme de toutes les passions humaines... Une émotion intense peut se matérialiser ou se communiquer : un chagrin peut faire déborder un évier, une grosse colère consumer des vêtements, un serment peut s'incruster dans la chair. Si un secret veut sortir, se taire ne suffira pas toujours à l'en empêcher. L'intuition des londoniens est curieusement décuplée.Les personnages
Un groupe de copines trentenaires célibataires abonnées à la lose. Elles ont des ambitions inaccessibles ou qui ne leur ressemblent pas : décrocher une promotion ou le job de leurs rêves, trouver un prince charmant et cocher la case mariage-maison-enfants, ou au contraire pouvoir accumuler des conquêtes de prestige et se penser en reine du sexe... Mais la malchance leur colle à la peau : coïncidences, quiproquos, moments de gêne, intrusions des proches dans les moments d'intimité, etc.
2 tours de wordlbuilding : on pose chacun un lieu et/ou un PNJ à tour de rôle
Le Pub “The Saints”, où les PJ se retrouvent souvent. Le patron Owen fait souvent des blagues/jeux de mots foireux, sans chercher à blesser mais sans faire attention au contexte. Le pub est un peu fréquenté mais pas bondé, avec un jukebox et des chansons disco. Soirées karaoké à l'occasion.
Simon, le colocataire de Ginny, un thésard en physique quantique, trop beau (mais elle est sûre qu’il est gay), il s’occupe des plantes et l’engueule quand elle ne fait pas sa part de ménage.
Miss Shirlington, la propriétaire d'Alicia qui lui loue son sous-sol aménagé. Elle a plein de chats, un beau peignoir en soie, et surtout des problèmes de limites de vie privée.
Janice, la Nemesis de Kattie au bureau. La collègue trop parfaite, trop gentille, qui fait des petits fours délicieux, pense toujours aux anniversaires, et à qui tout réussit, même ses séances de nail art, quand ça foire pour les autres...
La pièce à vivre du personnel : ficus géant, micro-ondes, bouilloire. On y trouve toujours Chris-du-boulot, le mec bizarre qu’on sait pas dans quel service il travaille, et qui fait toujours des remarques étranges. Le bruit court que ce serait le boss du boss, mais personne ne veut se mettre à côté de lui pendant les réunions, il a mauvaise haleine.
Chris Cunningham, l’entraîneur beau gosse des Wild Kitties, la team de roller derby dont font partie les PJs. Ginny voulait faire une team de bowling mais elle a dit ok quand elle a vu Chris, sur lequel elle craque complètement malgré son peu de disposition pour les roulettes. Chris est évidemment le petit ami de Janice.
Les instances
Les trois amies sont au Saints devant une bière, Ginny se demande comment échapper avec dignité au match de roller derby du samedi. Les filles lui remontent le moral et lui suggèrent de demander des leçons particulières à Chris. Ginny envoie un texto mais le correcteur orthographique change le message et envoie « est-ce que tu pourrais me donner un cours particulier pour le slow de samedi ».
Kattie a un plan démoniaque pour ruiner la réputation de Janice : blinder son historique de recherche au boulot de sites de sextoys. Elle a imprimé une feuille pour montrer un exemple de ce qu'on peut trouver sur le net : les trois filles s'interrogent sur comment ça marche, Owen le patron a l'air de savoir mais est interrompu au moment d'expliquer.
Alicia a trouvé un nouveau boulot : elle est désormais fleuriste pour Dahlia, qu'elle découvre être une très bonne amie de Janice.
Ginny danse un slow avec Chris... mais elle se réveille quand Simon tambourine à sa porte. Elle part en catastrophe au boulot, se fait un raccord maquillage alors que le métro a 2h de retard à cause d'une énorme racine sur les voies. Elle arrive échevelée et en sueur au bureau, juste à temps pour intercepter Janice qu'elle avait promis de distraire, pour que Kattie aille bidouiller sur son ordinateur. [conflit simple, raté] Malheureusement Janice n'a pas très envie de parler, alors Ginny sort les grands moyens en s'ébouillantant le chemisier avec le café de celle-ci. Chris-du-boulot intervient pour « éponger » et commence à défaire le chemisier pour sauver Ginny.
Kattie se glisse à quatre pattes dans l'open space et bricole sur l'ordinateur qu'elle pense être celui de Janice. Dans son dos, Peter l'informaticien semble complètement absorbé par la page qu'elle affiche... Embarrassée, Kattie échange quelques mots avec lui genre « ce que certaines font sur leur poste de travail quand même... » et Peter la regarde s'éloigner, songeur. [conflit simple, raté] Dans son dos, elle entend une voix masculine et comprend qu'elle s'est trompé d'ordinateur.
Chris l'entraîneur appelle Alicia parce que le texto de Ginny pour un cours de slow l'étonne : y'avait pas match samedi ? Alicia invente un bobard (Les Chiennes de l'enfer ne peuvent pas venir finalement) et suggère de confirmer auprès de Kattie. Elle textote comme une folle à Kattie de jouer le jeu et à Ginny que bravo t'as bien joué !
Dahlia lui signale que le texto c'est pas du boulot et lui suggère d'aller livrer un bouquet de fleurs de la part de Chris à Janice. Alicia file au bureau de ses amies et se retrouve obligée de le refiler à Chris-du-boulot qui est lourd.
Ginny s'est pomponnée comme une reine du slow. Elle débarque au Dancing, où Chirs lui a donné rendez-vous... et découvre qu'en réalité c'est un club de danse de salon pour personnes âgées. Chris est en train de montrer un pas avec Miss Shirlington, la propriétaire d'Alicia. Elle passe une looooongue soirée, surtout quand elle comprend que Chris est persuadé qu'elle lui demande des cours pour un date avec quelqu'un d'autre. Au moment de rentrer, elle renverse son sac et laisse échapper son journal. Dans le Dancing vide, une main se pose dessus.
Kattie se fait alpaguer par Chris-du-boulot qui lui demande des nouvelles de Ginny. Il est complètement fasciné par le grain de beauté qu'elle a sur le sein. Kattie essaie de lui faire comprendre que c'était un malentendu et qu'il ne devrait pas s'emballer, quand Janice arrive. Chris fait un genre de syncope et Janice file appeler des secours en ordonnant à Kattie de rester près de lui. [conflit simple, raté] Chris enfouit son nez dans le décolleté de Kattie, sous le regard de malaise des collègues de la salle de pause.
Alicia est en train d'essayer une robe de mariée. Comment en est-elle arrivée là ? Flashbacks. En livrant les fleurs au boulot, elle est tombée sur Peter. Elle a besoin de lui et ses connaissances informatiques pour pirater les agendas et plannings du club et faire annuler le match de samedi... Et une chose en entraînant une autre, elle l'a ramené chez elle sous le nez de Miss Shirlington (qui feuillette un petit livre en buvant son thé, genre... un journal?) et il s'emballe et veut la présenter à ses parents. Là, il lui propose d'aller essayer une robe de mariée. Embarras. Jusqu'à ce qu'Alicia comprenne que c'est juste pour rendre service à sa sœur qui va se marier.
Ginny est dans une mauvaise passe. En deux jours, elle a touché le fond : elle reste en pyjamas devant la télé à manger des saloperies, laisse traîner des emballages vides partout sous l'oeil peiné de Simon, et pleure tout le temps. Kattie réagit par une Intervention : elle débarque avec des bières et suggère une soirée karaoké au Saints pour se remettre en piste. Les deux filles embarquent Simon d'autorité.
Ellipse. Simon et Ginny braillent en duo dans un micro pendant que Kattie immortalise l'instant avec son téléphone. Dans le bar, une ambiance de mort. La musique change, c'est un slow. Timing parfait, Chris et Janice entrent dans le pub. [conflit simple, raté] Alors que Ginny enlace Simon en jetant un regard triomphant à Chris, persuadée d'être la reine du pub, Simon lui vomit dessus.
Chez les parents de Peter, Alicia fait une fausse manip sur instagram et la photo de Ginny se faisant vomir dessus devient un meme sur les réseaux.
Alicia, dévorée par la culpabilité, se fait alpaguer par Ginny alors qu'elle livrait des fleurs au boulot de ses copines. Ginny lui reproche d'avoir ruiné sa vie. De l'autre côté de la cloison, Peter demande des conseils à Kattie sur comment donner vraiment du plaisir à sa copinen vu qu'elle a l'air de s'y connaître. Alicia s'engage à arranger les choses auprès de Ginny... Dans sa tête, elle va tout planifier avec Pete, modifier les agendas des gens, les mails, les numéros de téléphone pour accumuler les coïncidences, écarter Janice et faire que Chris l'entraîneur tombe amoureux de Ginny. [conflit duel]
Sauf qu''il y a un malentendu dans le brief, et Peter pense qu'elle parle de Chris-du-boulot... Ellipse. Chris-du-boulot tend à Ginny un muffin sur lequel est écrasé une bague. Les placards de la salle de pause s'ouvrent et des fleurs se déversent dans la pièce. Mortifiée, Ginny se sauve et pose sa démission. Ellipse. Elle dit au revoir à Simon, sur le seuil de leur colocation, avec ses valises. Ellipse. Elle sonne chez ses parents, avec une mine contrite. De son côté, Alicia se fait virer par Dahlia pour toutes les fleurs qu'elle a volées au magasin. Et Kattie veut se trouver un autre boulot, une autre boîte.
Les feuilles de personnages
Ginny
Je veux me caser comme Janice (rayé)
[5]Je veux tellement danser un slow avec Chris (rayé)
[8]Ma réputation au bureau s’est fait ébouillanter (rayé)
[2]Mon journal est-il tombé en de mauvaises mains ? (rayé)
La pitié c’est presque de l’amour, non ? (rayé)
Alicia
Je veux caser Chris Cunningham avec Ginny
[9]Je travaille chez Dahlia (rayé)
[8]Un bouquet pour chaque grande occasion
[8]Je suis en couple avec Peter du service informatique
[2]J’ai transformé Ginny ma meilleure copine en meme
Katy
Je veux doubler Janice et devenir la chef de mon service comptabilité
[9] J’ai un plan démoniaque
Peter, l’informaticien relou, m’a surprise en plein dans mon plan démoniaque, il me fait des clins d’oeil maintenant…
[7]Chris a vu nos poitrines, à Ginny et moi (rayé)
[8]Je suis devenue la bonne pomme du service
[1]Je suis nulle comme coach personnel
Débrief
Super chouette partie, on a fait quasiment du Fiasco en réalité, mais c'est pas mal dû aux échecs à répétition (des conflits quasiment tous ratés).
Le CR peut être assez atroce à lire à froid, mais en réalité les scènes étaient vraiment comiques et assez jubilatoires à jouer. On était dans le canon, ça a losé sévère, mais sans conséquence trop dure et sans que ce soit vraiment la faute des PJ. Inflorenza a repris le dessus à la fin en annihilant un personnage (main contaminée aux sacrifices). On avait posé avant de jouer que toutes les phrases rayées ne signifieraient pas la mort d'un PJ mais son retour chez ses parents.
Les deux tours de worldbuilding étaient très sympas, et du coup on a écrit nos premières phrases « à blanc », sans jouer. Rétrospectivement, on aurait dû en profiter pour présenter nos persos à ce moment-là, on a loupé le coche.
Un aménagement : chaque instance commençait par « cher journal ». Ça a permis des allers-retours assez chouettes dans la timeline, en commençant souvent une instance par un retour en arrière (et une fois par un bon en avant). A la fin, quand les instances s'enchaînaient bien, on a lâché le « cher journal » machinalement.
Beaucoup de conflits simples, mais c'est raccord avec Bridget Jones, où il n'y a pas tant de tension entre des personnages qu'un conflit permanent entre Bridget et le monde (la malchance) en général. Le dernier conflit était un duel entre le plan d'Alicia et la poisse de Ginny, ça a très bien rendu.
On a été très légers sur Millevaux, mais c'était pas évident à doser. Je serais curieuse de voir ce que ça donne avec un petit peu plus d'exotisme forestier/fantastique.
[Retour de Thomas Munier sur le message initial sur Courants Alternatifs :]
Eugénie, un grand merci à ton équipe pour cette partie et ce théâtre audacieux, et à toi pour le CR !
Le théâtre est super cool, c'est fort d'avoir imbriqué autant les thèmes de Millevaux et ceux du Journal de Bridget Jones. Racines et crème glacée, il fallait oser.
C'est vrai qu'on voit l'effet Fiasco vu la quantité de conflits que vous avez ratés, mais pour le coup c'était bien raccord avec l'ambiance Bridget Jones ! Des fois j'ai l'impression que les dés sont magiques et sortent toujours le résultat le plus approprié (dernière séance que j'ai faite - Aborigenalyptica -, un combat épique entre les aborigènes d'Australie et l'invasion forestière-coloniale ; tous les conflits de la partie gagnés, sauf le dernier, le plus crucial et le plus épique, qui a soldé la lutte par une amère déchéance).
Si le théâtre est très Millevaux, je suis d'accord avec toi sur le constat que la partie était plus Bridget Jones, ceci dit on retrouve quand même le métro en retard à cause des racines, les journaux et historiques internet, les voisines espionnes, bref tout le trip sur le passé et sur les ragots. Et on retrouve tout à fait le côté drama d'Inflorenza !
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LE MARIAGE DE HENRY & SEBASTIAN
Nouveau test du théâtre Millevaux Bridget Jones par Eugénie !
crédits : dweekly, erin m, licence cc-by-nc, galeries sur flickr.com
C'est un retour rapide plutôt qu'un CR complet, sur une nouvelle partie du théâtre London Girls (à la manière de Bridget Jones).
Inflorenza Classique en Carte rouge (sans MJ).
5 joueurs. Nous avions tous déjà joué à Inflorenza. En terme d'inspirations, nous étions un peu moins branchés comédie romantique que ma table précédente (voire pas du tout pour certains).L'histoire
Chacune des filles avait ses problèmes (sortie d'une rupture difficile, obsession du célibat, envie de devenir une vraie rockeuse, être coincée définitivement dans la friendzone...) et devait trouver un "+1" pour les accompagner à un mariage. Evidemment deux d'entre elles avaient le même homme en vue, qui était le patron d'une autre, ou encore l'une avait un nouveau petit ami sur les conseils de sa mère, qui était en réalité l'ex tout récent d'une autre...
C'était plus orienté plans drague moisis que scènes de bureau cette fois-ci, mais ça a très bien marché. Avec deux événements phrares : le concert « jeunes talents » où les enjeux sont montés d'un cran pour tout le monde, et un tour de table climax pour le mariage où le décor a fini en apocalypse (mais une apocalypse raisonnable et limitée par l'arrivée des pompiers).
Le fonctionnement
Comme les autres joueurs étaient tous des hommes, j'ai ouvert la possibilité d'incarner un Ted Mosby (How I met your mother) mais ils ont tenu à jouer le jeu et incarner des femmes.
Le coup du "Cher journal" en début d'instance marche toujours aussi bien. Je vais l'inclure dans le théâtre, histoire d'y penser à chaque fois.
La dynamique « meilleures amies » fonctionne mieux à trois. Mais le fait d'être 5 joueurs nous a poussés à plus de conflits duels et ça tournait bien. Même si du coup on a fait un léger pas de côté par rapport au "canon" Bridget Jones.
Millevaux
C'est marrant comme l'Egrégore et les réseaux sociaux se marient bien. On a eu des scènes chouettes avec des photos de couple supprimées qui réapparaissent dans le téléphone tout les matins (rupture difficile), d'un profil sur des sites de rencontre modifié par "fausse manip" (on ne sait pas comment... Et aussi un chat qui grossissait et s'ensauvageait à cause de la frustration inavouée de sa maîtresse.
On a eu un peu d'emprise aussi avec une symbiose physique entre une des filles et son "+1" sur la fin.
Toujours très peu de forêt par contre, mais je pense que c'est le décor qui est un peu limite de ce côté-là.
Retours
Tous les joueurs étaient très contents (et moi aussi !)
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CEUX QUI SÈMENT
Never trust a fougère ! Un récit assorti d'ateliers et d’un théâtre d’asile psychiatrique inspiré de Patient 13, par Eugénie.
Compte-rendu initialement posté par Eugénie sur le blog La partie du lundi.
Le jeu : Inflorenza, héros, salauds et martyrs dans l'enfer forestier de Millevaux
Le contexte
Une partie proposée dans le cadre de l’UdoCon, avec Manuel, Eugénie, Orfeo, Gabzeta et Chestel.
On joue en mode Classic et Carte Rouge (avec dés, sans MJ).
Le théâtre est à retrouver sur la page téléchargements, il est librement inspiré du jeu Patient 13 d’Anthony « Yno » Combrexelle.
De l’hôpital, personne ne s’échappe. Depuis combien de temps les patients sont-ils là ? Est-ce qu’il y a encore un monde au dehors ? De tous côtés, la forêt presse la bâtisse et s’infiltre. Elle remonte par les canalisations, crève des fenêtres ou grimpe le long des grilles. A l’intérieur, un claquement de talons aiguilles, la roue déglinguée d’un brancard, les ongles sur les murs. Les hurlements.
Les personnages
Fougère, Petite Peau, Le Muet, Le Gourmet, La Petite Fille
L'histoire :
Semis de médicaments, graines de folie
« Docteur, ça va pas très fort ». Fougère prend son psychostimulant pendant sa séance avec son Supérieur. Il ressort un peu flottant dans le couloir. Dans sa chambre, il est accueilli par la gouaille de Bob, sa fougère.
« J’ai des problèmes de déglutition ». Petite Peau tente de convaincre la Blouse blanche qu’elle est dispensée de médicament mais ça ne prend pas, et elle finit par avaler. Dans le couloir, elle croise Fougère qui lui tend un petit brin de fougère. Elle le remercie d’une voix d’enfant qui n’est pas raccord avec son corps de trentenaire. Elle passe ensuite à l’infirmerie pour son rendez-vous du lundi où un Supérieur en fauteuil roulant la fait asseoir sur un lit. Elle remonte sa blouse en fermant les yeux : sur sa poitrine, sa peau est fermée par de gros boutons, comme un manteau.
« … » Le petit Muet fait semblant de prendre son médicament, mais dès que la Blouse blanche est partie, il relève ses couvertures et révèle une forêt de petits pots de fleur cachés sous son lit. Il y plante soigneusement la gélule qu’il vient de recracher. Un jour, ça va pousser.
« J’adore mes médicaments ». Le Gourmet attend avec impatience ses médicaments, c’est le plus beau moment de sa journée. Il les déguste avec soin. Il pourrait en avoir plus, s’il le voulait… Il sait où en trouver. Contrairement aux autres, Le Gourmet se souvient de tout depuis le début de l’hôpital, de tout, bien sûr, de tout, vraiment. Il. Se. Souvient. De. Tout.
« Si je prends la bonne, je pourrai revoir ma soeur, c’est ça ? » La Petite fille a le choix entre deux gélules. Elle tient une poupée avec des boutons dessinés sur le torse. Elle hésite puis prend une des deux gélules. Fondu au noir.
La Petite Fille entre dans la chambre de Fougère mais elle ne voit qu’une plante en pot, au milieu de la pièce. Elle sort un petit coupe-ongles de sa blouse et commence à en découper les feuilles, petit bout par petit bout. Bob la Fougère l’engueule et lui explique que les esprits peuvent parler. Fugacement, la Petite Fille entend un écho de sa soeur. Mais juste après, le silence.
Trésors volés
Une Blouse blanche utilise une monstrueuse seringue pour injecter son médicament à Fougère, directement dans la moelle épinière. Ce dernier hurle et se tortille sur le sol, les membres raidis par la douleur. Petite Peau s’invite dans la chambre et lui tient compagnie, sans remarquer le problème. Fougère s’accroche à son poignet. La feuille tatouée le long de sa colonne vertébrale est devenue couleur rouille. Petite Peau demande : « C’est l’automne ? »
Petite Peau essaie de convaincre la Blouse Blanche qu’elle est dispensée de médicament, c’est marqué dans son dossier. Mais la Blouse Blanche lui inflige une gélule pour maman, et une gélule pour papa… Elle avale. Dans le couloir, elle tombe sur Le Gourmet qui lui suggère de faire semblant de prendre ses médicaments et les lui apporter. En échange, il l’aidera à retrouver ce qu’elle voulait dire à Fougère, car il se souvient de tout. Elle s’est perdue dans le couloirs et petit à petit le carrelage a changé, les murs ont disparu. Elle évolue dans une immense forêt en noir et blanc. Un bruit et elle est à nouveau dans le couloir de l’hôpital.
Le Muet est invité à parler par sa Supérieure mais il s’obstine à se taire. Puis il revient prendre son médicament dans sa chambre. Quand il se penche pour le mettre en pot sous son lit, il fait un faux mouvement et en renverse un : horreur, la terre se répand sur le sol et il n’y a plus de gélule dedans. Il enfonce ses doigts dans tous les pots mais quelqu’un lui a volé ses « graines de médicament ». Il entre dans une rage folle et jette les pots contre les murs de sa chambre. Une silhouette entre dans la chambre. Heureusement ce n’est pas une Blouse Blanche, c’est la Petite Fille.
Le Gourmet adore prendre ses médicaments, c’est le plus beau moment de sa journée. Il convainc une autre Patiente, Roulade, de faire diversion pour qu’il puisse voler le contenu du « chariot à médicaments » qui sert à faire le tour des patients. Mais les Blouse Blanches les surprennent tous les deux et les montent aux lits à clous. Le Gourmet suffoque. Soudain, il est au sous-sol, dans environnement saturé de champignons, qui suintent des murs, en noir et blanc. Il essaie désespérément de respirer pendant qu’il se fait entraîner vers le lit à clous, et qu’il entend Roulade hurler et supplier qu’elle n’y est pour rien.
La Petite Fille hésite devant les deux gélules. Sa poupée a une fermeture éclair sur le torse. Fondu au noir.
Dans la chambre saccagée du Muet, la Petite Fille lui demande s’il a vu sa soeur ou s’il entend les esprits. Pour la première fois le Muet parle à quelqu’un. Beaucoup. Même trop. En parallèle, Fougère s’adresse à la Petite Fille, mais il ne perçoit pas la présence (ni les paroles) du Muet. Dialogue à trois surréaliste.
La Petite Fille se tourne vers Bob la fougère, un sécateur à la main. Mais l’outil se retrouve dans les mains de Fougère, et c’est lui qui lui coupe la langue. Mais au moment où elle se détache, il se demande ce que la langue aurait eu à lui dire. Il regrette.
Les mots de la fin
Petite peau entre dans la chambre de Fougère où elle ne voit que Bob la fougère en pot qui lui parle avec sa gouaille habituelle. Elle ne l’entend pas, mais elle soliloque avec la fougère, en un apparent dialogue. Elle finit par la déposer contre la fenêtre pour qu’elle ait plus de lumière.
Petite Peau essaie de convaincre la Blouse Blanche qu’elle est dispensée de médicaments. Sans succès. Elle avale. Elle se rend à sa visite médicale du lundi, où elle retrousse sa blouse. Sur son torse, les boutons sont devenus une fermeture éclair. Le Supérieur farfouille dans ses entrailles en marmonnant puis la referme. Il lui conseille de faire attention, une graine s’est infiltrée et ça pourrait déboucher sur une infection.
Petite Peau erre dans les étages, elle fait toc-toc à la porte du lit à clous du Gourmet pour s’excuser de ne pas avoir pu lui apporter de gélule… Une Blouse Blanche lui enjoint de fiche le camp, c’est interdit de rester là. « Vous savez j’ai appris ce matin que j’ai un grain… une graine », lui répond Petite Peau d’une voix d’adulte.
Les médecins ont cousu une nouvelle langue au Muet, qui parle. Il parle tout le temps. Il parle, il parle, il parle. Au réfectoire, alors que chacun doit manger en silence, lui est autorisé à parler. Les autres patients sont exaspérés. Les Blouses Blanches aussi. Il ne se rend pas compte qu’il est seul, des heures après, dans le réfectoire vide. Il parle toujours. Des patients entrent dans son dos et l’immobilisent sur une table, lui tenant le menton dans un linge mouillé. Ils veulent le faire taire. Mais sa langue s’échappe, et c’est tout l’hôpital qui est contaminé. Gagné par le flot verbal, tout le monde se retrouve à marmonner des mots qu’on ne trouvait plus, la fin des phrases qui n’a jamais été terminées, des secrets qu’on voulait taire.
Le Gourmet marmonne, sur son lit à clous :« Je me souviens, je suis le Directeur, je me souviens, je suis le Directeur… »
Fougère a disparu, reste une plante en pot au milieu de la chambre, qui répète : « Je suis sain d’esprit, il faut me laisser sortir maintenant ».
Petite Peau se regarde dans la vitre. Elle enlève sa blouse, et ouvre la fermeture éclair sur son torse. Il en sort une fillette, en tous points semblables à la poupée de la Petite Fille, qui dit : « laisse-moi partir, je ne suis pas ta poupée, laisse-moi vivre, je ne suis pas ta soeur ».
Feuilles de personnage
Fougère (N°12)
[Règlement] Je ne veux pas qu’on sache de quoi est capable ma fougère (rayé)
Ma fougère est saine d’esprit
[Nature] Fougère craint la rouille
[Egregore] Fougère sait faire le tri des mensonges
[Mystère] Il faut que je trouve ce que la langue a à dire
[Corruption] Il faut que je me fasse pardonner auprès de qui j’ai coupé la langue
Petite Peau (N°7)
[Mystère] Je veux retrouver ce que j’avais à dire à Fougère
[Chair] Ma peau est un manteau
[Nature] Un jardin m’attend quelque partenaire
[Folie] Il paraît que j’ai un grain
Le Muet (N°23)
[Pulsion] Je veux récupérer la feuille que Fougère a offerte à N°7 (rayé)
[Corruption] Un jour ça finira par pousser (rayé)
[Thérapie] Les docteurs ont inventé quelque chose pour m’aider à parler
Le Gourmet (N°8)
[Hôpital] Je veux goûter tous les médicaments cachés du potager
[Mémoire] Je me souviens de tout, vraiment
[Nature] Faut pas respirer les champignons, j’asphyxie !
Je suis le Directeur
La Petite Fille
[Quotidien] Je veux retrouver ma soeur
Maintenant j’entends parfois des esprits
Les esprits mentent
Fougère m’a coupé la langue
Je comprends ce que ça fait de couper la parole
Débrief d’Eugénie
Le retour sur les ateliers est à retrouver par ici.
Plusieurs très belles expérimentations sur cette partie :
– sur le corps : Fougère a mimé ses torsions de douleur, des joueurs ont joué physiquement le passage du chariot à médicaments, les roulades de Roulade et l’attaque du chariot ;
– sur les réalités : la Petite Fille et Petite Peau étaient manifestement connectées mais nous avons fait attention à ne jamais les jouer ensemble dans la même scène. Difficile de savoir si l’une était la soeur de l’autre, la poupée ou projection de l’autre, ou la même personne ;
– des dialogues/monologues : sur une des scènes, Le Muet et Fougère s’adressent à la Petite Fille, mais les deux ne se voient pas l’un l’autre. Les réponses de la Petite Fille à l’un perturbent l’autre et ils en font la remarque (mais pourquoi tu me parles de ça ?) ; sur une scène entre Fougère et Petite Peau, Petite Peau ne voit que la fougère et soliloque en s’adressant à elle, alors qu’à la table Fougère parle et répond…
Deux légers regrets : certains éléments n’ont pas été utilisés (ce que Petite Peau avait à dire à Fougère par exemple) et les phrases d’objectif n’étaient pas assez fortes ou n’ont pas été vraiment jouées.
Au final, une super chouette partie !
Débrief du joueur de Fougère
La volonté intense d’expérimenter sur la perte de repères et les obsessions personnelles ont pu rendre les choses un peu confuses et décousues. A lire le compte-rendu, je me dis qu’on aurait gagné à un tour de parole de plus (au moins) avant de foncer sur la conclusion de chacun. Là on a la prémisse, un bon développement de l’hôpital et des relations préliminaires, mais je trouve que la l’accélération est vraiment trop brutale vers la conclusion et qu’il manque d’un développement un peu plus charnu. Mais comme on bricolait beaucoup, on aurait probablement risqué de s’y perdre.
On a un récit sans schéma actanciel clair (voir même 4 récits), et on a posé un paquet de fusils en ne voyant qu’une toute petite partie des coups de feu partir. Je sais pas si c’est lié au jeu, au nombre de joueur ou à la disposition d’esprit dans laquelle on était, mais en tant que joueur spectateur, c’est un peu frustrant. Et je pense que c’est aussi ça qui rend les actions de la partie difficiles à mémoriser : ce sont plein de beaux moments, mais on a pas suffisamment d’enchaînement logique pour qu’un souvenir appelle le suivant.
Pour faire quelque chose qui oscille entre la folie et la reverie, ça marche très bien, mais d’un point de vue narration, ça donne l’impression (et ça sonne plus dur que ça n’st en réalité) qu’on ne raconte rien. On juxtapose des moments et des motifs, comme un exercice de surréalisme, on crée un ensemble indéniablement poétique, mais pas vraiment une histoire « cohérente ».
Reste que si ça ne fait pas une grande fresque cohérente, il reste des putains de scènes (parce qu’elles sont toutes individuellement assez super). C’est très cohérent pour du surréalisme. ?
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LA PEUR DU CIEL
Une aventure en hommage au Trône de Fer, entre complots de cour et prophéties apocalyptiques. Un récit, par kF, avec un mini-théâtre associé.
C'est la rentrée, c'est donc le moment de ressortir Inflorenza des cartons !
illustration : Gustave Doré, domaine public
Partie avec deux autres joueurs. L'un a déjà fait du jeu de rôle, l'autre est débutant. J'ai présenté Millevaux puis Inflorenza, et proposé de construire un théâtre inspiré du Trône de Fer : dans un royaume où le Roy peine à asseoir son autorité, les grandes familles complotent et se querellent en négligeant une sombre menace qui plane. On a brainstormé un peu et j'ai proposé de créer à l'avance quelques-unes des grandes familles en les liant chacune à un thème. On a abouti au théâtre suivant :
1. PEUR DU CIEL
Depuis quelques temps - semaines, mois ? - le ciel est obscurci de nuages compacts qui ne disparaissent jamais. La curiosité commence à inquiéter les habitants du royaume qui y voient un sombre présage. Mais de quoi ?2. GUERRE / Famille : les Fer-Ardent
Les Fer-Ardent sont l'actuelle famille royale. Ils sont connus pour leur pouvoir militaire ; c'est d'ailleurs par la force que le Roi actuel a pris le pouvoir il y a quelques dizaines d'années.3. MEMOIRE / Famille : les Mortbois
Les Mortbois sont les gardiens du savoir écrit. Ils tiennent l'essentiel des bibliothèques du royaume et on sait que leurs chroniques sont exactes et précises.4. PULSIONS
5. MASQUE / Famille : La Couronne
Le thème du Masque est celui des identités cachées, des usages de la cour et de l'étiquette. La famille de la Couronne est nommée ainsi car ce sont eux qui tenaient le trône avant que les Fer-Ardents ne l'usurpent ; ils restent riches et influents malgré leur évidente inimitié envers le Roy.6. RELIGION / Famille : les Polaris
Les Polaris ont amené la religion au peuple, sous la forme d'oracles et de prophéties que leurs ancêtres ont lu dans les étoiles qu'ils transmettent oralement, quitte à ce qu'il y ait des pertes. Ils entretiennent une antique rivalité avec les Mortbois et voient les nuages qui occupent le ciel comme l'annonce d'une Apocalypse à venir.
Il y avait aussi une famille pour Pulsions (les Furie) mais comme ils ne sont pas du tout intervenus on a fini par les supprimer en jeu. Je crois que leur nom était tellement nul que personne ne voulait les amener en jeu !
Fiction
Les personnages aux noms soulignés sont ceux des joueurs.
L'histoire s'ouvre sur le retour à la capitale du prince, Aubin de Fer-Ardent, après plusieurs années dans le Nord froid et glacé. Il convoque une audience auprès de son père le Roy pour lui faire part de ses inquiétudes vis-à-vis de l'étrange ciel qui recouvre désormais le pays ; pour le convaincre que la menace est réelle, il sort d'une caisse une météorite noire qui serait tombée du ciel. Il force un prisonnier à la toucher devant la Cour et le malheureux meurt alors en quelques minutes, hurlant de douleur. Le Roy a l'air grave et accède à sa demande de constituer une commission pour étudier le phénomène et en chercher des traces dans le passé, et Aubin est nommé Protecteur des Cieux. Il ne remarque pas que le Baron de la Couronne, vieil adversaire des Fer-Ardent, quitte la salle avec un sourire aux lèvres.
Eusèbe de Mortbois, un jeune noble issu d'une branche bâtarde de sa famille, veut absolument travailler avec lui. Il se fiche assez de ce qu'il va se passer ; il espère écrire aux côtés du prince l'histoire de l'Apocalypse qui s'annonce et faire de ce récit le tremplin qui lui permettra d'obtenir une place parmi les plus importants des Mortbois. Il convainc le prince de le laisser passer par lui pour accéder aux archives des Mortbois dans lesquelles sont peut-être consignées des histoires proches. Eusèbe a un secret : il doit son grand talent d'écriture à la Fumée, une drogue qu'il consomme et qui le fait passer dans un état d'écriture automatique. La Fumée est exclusive aux Mortbois mais c'est aussi un tabou et un grand interdit dans la famille, puisque seuls les écrits lucides sont acceptés dans les archives qui voient la Fumée comme une facilité inacceptable.
Alexandre de Polaris a beau être d'extraction noble, il a fui sa famille il y a longtemps et est aujourd'hui de retour à la capitale comme simple mercenaire. Le ciel le fascine et il n'est pas sûr que ce soit vraiment une menace. Il s'intéresse un peu au prince et se débrouille pour le rencontrer ; il avait peur que le jeune Fer-Ardent joue l'urgence pour se ménager une place dans l'échiquier politique de la capitale, mais Aubin s'avère sincère dans son désir de comprendre et éviter le désastre dans les cieux. Alexandre a par ailleurs des visions du ciel plus claires que n'importe quel Polaris, malgré les nuages. Il prête serment auprès du prince et de sa famille, et promet de le servir.
Les recherches avancent mais il ne faut pas longtemps pour que la politique et les complots de la capitale s'en mêlent. On traîne un matin le prince à la salle des audiences, où la duchesse Elisabeth de Polaris, la vieille matriarche qui dirige sa famille, produit un réquisitoire extrêmement violent à l'encontre du prince. Celui-ci avait certes exigé que chaque Polaris livre sa propre version de la Prophétie car il soupçonne que tous ne s'en souviennent pas de la même façon, et que les informations qui y sont cachées puissent aider à comprendre la situation, ce que les Polaris ont très mal pris ; Elisabeth l'accable en l'accusant plus ou moins publiquement d'être la cause de beaucoup de problèmes et de crimes récents, et d'utiliser l'excuse de l'Apocalypse pour servir ses propres intérêts.
L'accusation est finement construite même si elle repose sur du vent. Les semaines qui suivent, Aubin est forcé de passer de longues heures à employer des enquêteurs, des juristes, des avocats pour l'aider à se défendre. Il parvient à sauver la face et, bien que le doute plane encore pour une grande partie de la population, il est acquitté. Mais le soir même, lors d'un banquet donné en son honneur, le prince s'effondre, pris de convulsion, et meurt empoisonné devant toute la Cour réunie !
Dans les jours qui suivent, la commission se délite. Les rumeurs vont bon train et accusent bien sûr Elisabeth d'avoir précipité la mort du fils du Roy après avoir perdu son procès, mais il n'y a pas de preuves. Eusèbe a perdu le soutien sur lequel il comptait et Alexandre voit mourir le prince auquel il avait révélé secrètement sa naissance parmi les Polaris et son don de vision.
On le fait d'ailleurs requérir en audience, parce qu'il a été souvent vu avec le prince alors qu'il n'est qu'un mercenaire - quelle était donc leur connexion ? Il cache la vérité et invente de prétendues informations qu'il aurait acquises de la bouche d'un mourant assassiné par les Polaris. L'accusation blesse mais Elisabeth contre-attaque en révélant publiquement qu'il est lui-même un Polaris, car elle l'a reconnu malgré les années. Discrédité, il quitte la salle sous les huées. Il jure de venger la mort de son ami.
Eusèbe, mal vu par sa famille qui n'a pas digéré sa tentative de monopoliser les archives, décide de tenter sa chance et propose un marché directement à Elisabeth de Polaris, échangeant les recherches qu'il a menées avec le prince contre la protection et le statut que l'aristocrate peut lui conférer. Mais il comprend rapidement qu'elle n'est intéressée que par la Fumée, dont elle a entendu parler et avec laquelle elle pourrait enfin asseoir sa domination sur les Mortbois en permettant à sa famille de rivaliser avec eux même à l'écrit. Intimidé, il ne révèle pas ses secrets et l'alliance ne dure pas.
Eusèbe profite néanmoins de son passage dans le manoir familial des Polaris pour fouiner un peu et découvre un secret dangereux : des liasses de notes sur le prince, ses habitudes de vie, et des restes de poison. Il a trouvé la chambre de l'assassin ! C'est une femme, Alice, la compagne du Prince dans le nord. Elle a probablement été manipulée par les Polaris. Peu désireux de rester chez les Polaris et détesté par sa propre famille, il décide de chercher l'appui du Roy lui-même en lui révélant qui est l'assassin de son fils. Furieux, le Roy rend ses preuves publiques et fait arrêter puis exécuter Alice. La réputation d'Eusèbe s'effondre encore mais il est en faveur. Tous les regards sont tournés vers Elisabeth de Polaris, dont l'arrestation n'est maintenant probablement plus qu'une question de jours. Au moins, le Mortbois peut récupérer ses biens - confisqués par sa famille auparavant - et mettre la main sur une nouvelle réserve de Fumée, dont il semble dépendant.
Quant à Alexandre, désarçonné par la mort du prince, il avait lui-même cherché le soutien du Roy quelques jours plus tôt. Il s'était carrément infiltré dans sa chambre pendant la nuit et, comme avec Aubin, était parvenu à le convaincre de sa sincérité et à renouveller son allégeance. Il a carte blanche pour tenter d'agir et le protéger ; il va s'infiltrer chez les Polaris pour les surveiller de l'intérieur. En attendant, les nuages se font de plus en plus menaçants, il fait froid, et le peuple est inquiet. Quelques voix commencent à accuser les Polaris et leurs magouilles d'avoir amené le courroux divin, ou de l'avoir directement causé.
A la faveur de la nuit, Alexandre et Eusèbe se rencontrent à nouveau et décident de s'allier. Alexandre, dont le nom de famille est désormais connu publiquement, révèle son talent et sa propre crainte du ciel et du désastre à venir ; il fait alors une prophétie, car il est toujours capable de voir les étoiles à travers les nuages. Eusèbe consomme toute la Fumée qui lui reste et écrit, écrit comme un fou, consignant tout ce qu'il entend. Leurs talents combinés leurs permettent de comprendre que les nuages ne sont qu'une manifestation des troubles qui secouent le royaume. (La météorite était un roc d'égrégore solidifié et c'est à son contact qu'Alice, l'ancienne amante d'Aubin, s'est jurée de l'assassiner). Les deux ce qu'il arrivera demain : l'Orage, le désastre, et un coup d'Etat. Il faut agir !
Pendant ce temps, loin sous la ville, dans de vieilles catacombes, Elisabeth rencontre le Baron de La Couronne pour préparer leur coup d'Etat. Ce n'est pas leur première réunion, leur complot contre le Roy dure depuis un moment déjà ; en fait, c'est le jour où ils se sont promis de renverser le Roy que les nuages sont apparus au-dessus du pays. Le lendemain, le Baron demandera une audience pour expliquer publiquement leur version de la vérité : on complote contre Elisabeth ; les preuves avancées contre elle sont fausses et le véritable assassin du prince n'est autre que le Roy lui-même. Ils investiront alors le château avec l'armée personnelle du Baron et de la Duchesse, et renverseront les Fer-Ardent.
Alexandre a quelques heures pour agir avant le lever du jour. Il se rend compte qu'il ne peut pas arrêter l'Orage, c'est-à-dire que demain finira forcément dans un bain de sang quoi qu'il fasse. Désespéré, il va retrouver le Roy. Son allégeance sincère l'a transformé physiquement et il lui ressemble maintenant presque trait pour trait ; il conjure alors le Roy de s'enfuir, tandis que lui-même prendra sa place. Le plan est adopté.
Le jour se lève. Tout se passe comme prévu : dans un grand instant théâtral, le Baron de La Couronne accuse publiquement le Roy et revendique le trône que sa famille a perdu. De partout, des soldats surgissent et le château est le théâtre d'une longue et sanglante bataille au cours de laquelle Alexandre, maquillé en Roy, est assassiné. Toute la journée et la nuit sont occupées par les combats brutaux. Le lendemain, le Baron et la Duchesse ont gagné ; on empile sur la grand-place les corps des ennemis vaincus pour les brûler. Le Baron explique sa version des faits, désormais la seule acceptable, et est couronné Roy par la Duchesse Elisabeth de Polaris. Quand la couronne est posée sur sa tête, le ciel semble soudain s'ouvrir ; des trombes d'eau, des vents d'une violence inouïe et des éclairs terrifiants s'abattent sur la ville. La tempête dure une semaine ; lorsqu'elle s'achève enfin, et que l'on recommence à oser sortir, la ville est à moitié effondrée, les toits envolés, les habitants meurtris. Les rues sont jonchées de cadavres pourrissants. Il faudra longtemps pour que la ville et son nouveau Roy s'en remettent.
Epilogue
Eusèbe a fui la ville dès lors que les combats ont commencé. Il est le dernier témoin de la vérité. Devenu ermite, il passe des années et des années à rédiger l'histoire véritable de la chute des Fer-Ardent, sans utiliser la Fumée.
L'histoire ne dit pas si le Roy des Fer-Ardent revint prendre la capitale.
Feuilles de personnage
+ Je joue le Prince Aubin de Fer-Ardent, Protecteur des Cieux...
[X] (Peur du ciel) Je veux protéger ma famille car j'ai peur que ce ciel présage de notre chute
[X] (Masque) Je me méfie du Baron de La Couronne...puis la Duchesse Elisabeth de Polaris, Parangon de Justice du Royaume de la Couronne
[X] (Mémoire) Je veux que les Polaris écrasent et remplacent les Mortbois dans leurs fonctions de gardiens du savoir
[X] (Religion) Le secret du Brouillard (la Fumée) m'est à jamais interdit
[X] (Peur du ciel) La rumeur me tient responsable de l'étrange ciel qui nous surplombe
[X] (Guerre) J'ai un appui militaire, le Roy ne pourra pas m'arrêter si je ne le veux pas
[X] (Religion) Ma famille est de plus en plus exclue des jeux de pouvoir
[ ] (Mémoire) Je réécrira l'histoire, et je serai celle qui sauva le royaume
[X] (Pulsions) La vieillesse me guette, je suis pressée de mettre à exécution mes projets
+ Charfi joue Alexandre de Polaris
[X] (Guerre) Je veux réorienter les esprits vers la vraie menace en devenant mercenaire de la famille royale
[X] (Religion) Je crois que je suis beaucoup plus impliqué dans la religion que les autres Polaris, et la preuve c'est que je me rappelle toujours de la prophétie malgré la distance
[X] (Peur du ciel) Pour la première fois, je partage mon angoisse
[X] (Mémoire) Tout le monde sait que je suis un Polaris
[X] (Religion) Je vais infiltrer les Polaris
[X] (Mémoire) Un marché avec Eusèbe
+ Meven joue Eusèbe de Mortbois
[ ] (Religion) Je veux laisser mon nom comme étant celui qui a raconté l'Apocalypse
[ ] (Pulsions) Je suis un grand écrivain quand je suis sous l'emprise de la Fumée
[X] (Pulsions) Si ma famille l'apprend...
[X] (Religion) Je propose un marché à Elisabeth de Polaris : ce que je sais de l'enquête contre le rétablissement de ma position
[ ] (Masque) Le prix de ma révélation au Roy : maintenant chacun sait que je suis un fouineur ambitieux
[ ] (Religion) Pris dans la Fumée, je découvre ce qu'il y a derrière les nuages : l'état du ciel reflète l'état des familles
[ ] (Masque) Le Baron de La Couronne s'allie avec Polaris
Commentaires, remarques
+ La partie a pris un moment à démarrer. Une raison est qu'on jouait au début tous dans le même camp, et donc l'adversité n'était pas palpable. Ca m'a amené à précipiter un conflit avec la Duchesse pour miser beaucoup de dés, prendre des sacrifices et faire mourir Aubin. L'empoisonnement a vraiment lancé l'histoire, c'était un twist fort. En plus, le début était très centré sur la menace surnaturelle du ciel qu'on n'avait pas très envie d'expliciter aussi tôt, alors que la suite était beaucoup plus Trône de fer-esque avec ses complots en pagaille et ses histoires de famille.
+ Une excellente partie avec une super ambiance ! Je vais peut-être raffiner un peu cette idée de jouer des familles thématiques (ça fait un moment que j'y réfléchissais) et tenter d'autres parties dans des settings similaires. Ca marchait bien, on avait déterminé très peu de choses sur l'histoire du royaume au début (juste le fait que les Fer-Ardent avaient usurpé le trône des Couronne) et beaucoup de choses étaient naturelles à dérouler en jeu, comme la rivalité entre les Mortbois et les Polaris, les uns gardiens de l'écrit et les autres gardiens de l'oral.
+ On n'a pas du tout vu la forêt, ni les ruines. En fait, on n'a quasiment joué que dans la capitale et pas dans le reste du royaume. A part ça, le feeling était quand même très millevalien et inflorescent ! A un moment vers la fin, on s'est rendu compte qu'il était beaucoup trop tard pour éviter l'Orage, et que l'histoire se terminerait forcément tragiquement quoi que l'on fasse. C'était une réalisation très forte.
+ Curieux de voir ce qui se passe avec d'autres thèmes familiaux. Pour faire le parallèle avec le Trône de fer, le Roy Fer-Ardent était assez clairement Robert Baratheon, les Mortbois ce sont des mestres politisés et La Couronne ce sont un peu les Lannister et les Targaryens à la fois. Curieux de jouer aussi à plus grande distance, sur de plus longues échelles de temps.
+ Inflorenza, ça marche toujours aussi bien ! On a retrouvé le feeling d'ultra-cohérence que j'adore dans le jeu, quand vers la fin tout se met à faire sens de façon tellement précise qu'on répond à des questions qu'on ne se posait même pas. Ici, quand on a déterminé que les complots autour du trône avaient causé les nuages, tout est devenu évident d'un coup.
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A. Un grand merci pour ce CR ! Ce sont surtout les CR extérieurs qui font vivre le jeu.
B. C'est aussi rare qu'intéressant de jouer à Inflorenza en coopératif, je ne l'ai en fait expérimenté qu'une fois, dans une partie en trois séances du théâtre Tre Città per Morire. Mais en effet, il y a sûrement des efforts à faire pour que ça fonctionne, par exemple en twistant rapidement comme tu l'as fait (mais ensuite, tu es reparti sur du PVP en incarnant Elisabeth), soit si toute la table (ou au moins l'une des joueuses) fait l'effort de décrire une adversité forte contre laquelle tous les personnages sont opposés (et en l'occurence, le nuage n'était pas un bon candidat tant qu'il ne faisait que menacer. Elisabeth, en revanche, aurait pu constituer cette adversité coriace, si vous aviez continué à la jouer en figurante. Je crois que ça aurait pu marcher si chacun d'entre vous l'aurait incarnée à tour de rôle). Autre solution pour dynamiser un jeu coopératif, c'est exploiter les désaccords au sein du groupe : le groupe reste soudé, mais est en conflit sur des aspects mineurs. C'est ce qui nous a permis de belles scènes dans notre campagne coop en trois séances (mon personnage tombe enceinte d'un Corax, elle veut avorter mais un autre personnage, qui est Corax, s'y oppose).
C. Le Trône de Fer faisait partie des inspirations d'Inflorenza, je suis donc content de constater que ça fonctionne en jeu. J'ai moi-même joué une partie dans le style Trône de Fer : Le Destin des Arbresang.)
D. Le choix de tes thèmes peut expliquer que ni la forêt ni les ruines ne soient présentes. Si par hasard, tu veux y remédier, il faut y penser au moment où vous créez vos famille : en créant une famille de pilleurs de ruines, ou une famille d'explorateurs de la forêt. Ou en créant des écoles de pensées centrées autour des différents aspects de Millevaux. Ainsi, chaque famille noble pourrait se définir par sa façon de voir les différents aspects de Millevaux : les ruines, la forêt, l'oubli, l'emprise, l'égrégore, les horlas. Quelle famille pense qu'il faut brûler les horlas, quel autre pense qu'il faut mêler son sang avec eux, etc. C'est une technique à la Vampire La Mascarade que j'aime beaucoup parce qu'elle crée des débats au sein des joueuses et qu'elle instille l'univers de jeu au coeur même des systèmes de pensée des personnages. On en retrouve une trace dans les écoles de pensées des Confrères des Masques d'Or et des Corax, dans le manuel d'Inflorenza.
E. Pour jouer sur de grandes échelles de temps, il convient de le préciser dès le départ, par exemple en disant qu'il se passe toujours dix ans entre chaque tour de table. Sinon, le jeu t'entraînera naturellement vers des chronologies courtes.
F. On pourrait carrément considérer que l'Orage est un effet de l'égrégore. C'est en fait une métaphore qui prend corps : la métaphore du complot qui se traduit par l'amassement de nuages noirs au-dessus du Royaume. Faire coïncider le coup d'état avec l'éclatement de l'orage est alors très bien vu.
G. J'apprécie le compliment sur l'ultra-cohérence, je tempérerai juste en disant que c'est plus facile d'être cohérent avec seulement trois personnes à la table. Les parties à 6 ou 7 sont plus facilement incohérentes ou partent dans beaucoup de directions, à moins que chacun.e y mette du sien.
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B. C'est accidentel en fait. Comme les autres ne connaissaient pas Inflorenza, j'ai joué et créé mon personnage en premier, et puis les autres ont créé les leurs qui allaient dans le sens du mien. Il y avait dès le début l'idée de me trahir un jour mais pas tout de suite. J'aurais probablement dû insister un peu plus sur le fait de jouer des personnages fortement antagonistes (et aussi des personnages importants : je suis Prince, mais les deux autres se sont naturellement dirigés vers des rejetons secondaires de leurs familles, moins puissants) mais ça faisait longtemps que je n'avais plus enseigné le jeu.
D. En pratique, on jouait dans un Millevaux souple : l'univers forestier n'intervient pas si on ne le demande pas. Ca nous allait de ne pas jouer avec la forêt et les ruines.
E. C'est une idée à retenir ! J'aime bien les chronologies courtes, pour jouer des événements dramatiques - l'assassinat du Roi, le chaos dans la ville au lendemain - mais jouer de longues années peut être une bonne façon de redynamiser l'histoire au cours d'une campagne.
F. Ah, je n'ai pas dû être clair, mais : c'est exactement comme ça qu'on l'a interprété. L'Orage était en fait le symptôme du mal qui affectait le royaume, et plus précisément il était l'écho de la conspiration menée par Elisabeth et le Baron.
G. Oui, c'est vrai, et c'est aussi parce que le contexte appelait à la fois à formuler des secrets et des explications. Si nous jouions en vertige logique, ç'aurait été différent - mais il n'y a pas beaucoup d'adeptes du vertige par chez moi =(
Jouer à 6 ou 7, pour le coup, voilà bien quelque chose que j'éviterai à tout prix ! Je mets une limite à 4 (moi inclus), parfois je monte jusqu'à 5 mais je trouve que ça fait déjà trop.
En attendant, hier se jouait chez moi la première séance d'une campagne dans le même style que cette partie (mais indépendante). On a fait cette fois plus de world-building, en se basant sur un fond de carte, et en générant quelques nouvelles grandes familles. Je ferai peut-être quelques compte-rendus, sûrement succincts, pour parler de la façon dont ça se passe. Dans le setting actuel, il y a une forêt bizarre dont beaucoup ne reviennent pas, mais on l'a exclue du tableau de thèmes pour la première partie ; on la garde pour plus tard. Cet espèce de proto-Millevaux sera probablement l'équivalent de la "menace surnaturelle" qui surplombe le royaume, mais il faudra jouer pour voir ce qui arrivera. Et je n'avais absolument pas pensé à mobiliser plus du livre de base d'Inflorenza, mais c'est vrai que quelque sociétés secrètes et notamment une branche de Masques d'Or qui surveillerait la forêt serait du plus bel effet.
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B. En théorie Inflorenza fonctionne bien avec des personnages de rangs ou de puissance très différent, parce que le système joue le rôle de grand égaliseur, que le drama importe plus que le problem-solving, et que la mécanique (notamment le fait de pouvoir lancer les dés à distance, par l'égrégore) permet à tout le monde de mettre son grain de sel dans toute situation. Ceci dit, dans un cadre à la Trône de Fer, ça me paraît en effet pertinent que les personnages soient proches du pouvoir, voire même tous susceptibles de pouvoir poser leurs fesses un jour sur le trône, à condition d'intriguer. J'ai aussi eu un casting disparate en terme de rangs sociaux dans ma partie Trône de Fer et de fait on voyait bien que certains personnages, même si tous avaient un rôle dans les intrigues de pouvoir, n'étaient qu'indirectement concernés par la chasse au trône. Dans ta partie, il aurait peut-être suffi de peu : que le Mortbois soit un peu plus haut placé dans sa famille, et que le Polaris, bien que fugitif, soit aussi de haut rang (par exemple s'il avait été le fils d'Elisabeth, les choses auraient été plus corsées).
D. OK
E. On a tenté une partie (Moins Quarante) avec une instance tous les trois mois (ce qui faisait environ un an par tour de table). ça créait vraiment une ambiance différente (avec aussi des conséquences mindfuck).
F. OK
G. Le vertige logique, faut l'emmener par petites touches pour que ça prenne. Et ensuite, l'essayer c'est l'adopter :)
H. Très heureux d'apprendre que tu as lancé cette campagne Trône de Fer ! Et oui, des CR succincts, ce sera très bienvenu aussi.
G. Autre élément du lore officiel que tu peux utiliser : la Caste des Veilleurs (ils se sont chargé d'exterminer les horlas). Et une bonne partie des sectes diverses et variées peut être utile. Dans l'ensemble toute faction qui a un positionnement idéologique par rapport à Millevaux peut servir à faire le lien entre les intrigues de cour et le terrain. Concernant les Masques d'Or, les Corax, ou même les mutants, tu peux aussi proposer d'en faire des personnages jouables. En revanche, d'expérience j'ai constaté qu'ils sont très efficaces quand tous les PJ sont du même peuple parce qu'ils vont s'affronter par écoles de pensée interposée. Un casting mixte (du genre un humain, un corax, un mutant, un masque d'or) sera moins intense : le peuple ne sera alors qu'une couleur plaquée sur chaque personnage.
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L'EMPRISE DE LA REINE BLEUE
Un théâtre sur les voyages dans le temps à Millevaux, animé par Côme Martin, qui commence somme toute assez sagement pour finir dans un mindfuck assez total…
« Étant un indécrottable passionné de tout ce qui touche au voyage dans le temps, et un grand amateur d’Inflorenza, il était logique que je finisse par pondre un théâtre qui liait les deux entre eux… Il se trouve qu’Inflorenza est particulièrement adapté aux scènes dans le désordre, aux flashbacks et flashforwards imprévus et aux mindfucks qui se mangent plus ou moins la queue. Le thème du voyage dans le temps s’y insère donc tout naturellement. »
Côme Martin, quand il ne bricole pas les deux mains dans le surréalisme, est un expert en voyages temporels et un foufou d’Inflorenza. On lui doit un nouveau théâtre et ce compte-rendu. Merci à lui !
Compte-rendu initialement posté sur La Partie du Lundi
Itération
Une agence veille sur la bonne marche du temps. On dit que la monstruosité de Millevaux était écrite et qu’on ne peut l’effacer ; mais il demeure des taches répandues par l’Égrégore que les employés d’Itération doivent faire disparaître. Au cœur de la forêt, dans le passé obscur, le présent boueux et le futur incertain, les agents temporels sont envoyés rétablir la vérité, l’ordre et la causalité ; mais l’univers est résistant et nombreux sont ceux et celles qui ne reviennent pas, dévorés par le paradoxe, l’oubli ou des menaces bien plus tangibles.
Au lieu de juste jouer sur le voyage dans le temps, j’ai également creusé l’idée d’une Agence toute puissante, Itération, aux buts assez obscurs mais néanmoins vaguement menaçants, aux intentions pas tout à fait claires pour Millevaux et ses habitants. Un peu comme les scientifiques de l’Armée des douze singes en moins rassurant encore, somme toute.
J’ai aussi tenu à mettre des sous-thèmes dans chaque thème : vous le verrez à la lecture des fiches de personnages, nous avons souvent lancé deux fois le dé pour préciser la phrase que nous devions écrire.
Une fois le théâtre pondu (il est disponible ici), il ne restait plus qu’à le tester, et ce fut chose faite avec JC et Tom, relativement novices d’Inflorenza !
Nous avons joué en version carte rouge, c’est-à- dire sans MJ, et en ligne.
Échauffement
Je commence par lire le paragraphe de description de Millevaux, dans le livre de règles d’Inflorenza, puis celui qui se trouve sur le théâtre d’Itération (ainsi que les questions qui y sont liées), puis nous faisons un tour pour créer chacun un PNJ.
Je crée Grégoire, un ancien agent d’Itération perdu dans Millevaux depuis sa dernière mission qui aurait réuni autour de lui un clan qui lui voue une dévotion sans borne.
JC crée Violon, berger dont la chèvre (prétend-il) détecte l’arrivée des agents d’Itération, ce qui lui permet de leur servir de guide (et leur vendre services et informations).
Tom crée Emma, une femme d’une cinquantaine d’années venant du Millevaux du passé, qui par erreur s’est retrouvée envoyée dans le présent. Elle cherche depuis à rentrer chez elle.
Récit
Où le futur arrive à Millevaux
L’Ermite se réveille brusquement de sa sieste après un terrible cauchemar, encore plus bizarre que ceux qu’il fait depuis plusieurs mois, un cauchemar prémonitoire : il était au milieu de la forêt, les arbres ravagés par les flammes, une silhouette en contrejour pointant une sorte d’arbalète vers lui. La silhouette lui tire dessus et il se voit mourir avant de se réveiller : les arbres autour de lui sont les mêmes que dans son rêve. C’est sûr, c’est une vision du futur, et tout seul l’Ermite ne peut l’empêcher. Il ramasse ses maigres provisions, un bout de bois pointu, enfile des vêtements loqueteux, et se met en route vers le hameau voisin, à quelques heures de là.
La Voyageuse marche dans les couloirs du complexe haute technologie d’Itération, suivie par sa supérieure, visiblement inquiète.
« Tu n’as pas besoin de tout ça pour une simple mission de récupération !
– Je l’aurai, coûte que coûte. Et s’il faut cramer toute cette forêt pour le faire, qu’il en soit ainsi. »
Elle s’équipe de plusieurs arbres, dont une arbalète lance-flammes, avant de monter dans un module : une sorte de capsule à deux places, mi-technologique mi-organique, brillant d’une lumière verte et poisseuse. Elle rentre les coordonnées de l’Ermite et quitte Itération, apparaissant dans Millevaux en un clin d’œil. Autour d’elle, la nuit, un épais brouillard : il y a de toute évidence une erreur, elle n’était pas censée atterrir ici…
Nyrix s’impatiente à côté de l’arbre gigantesque qui sert de repère, une machette improvisée en main. À côté d’elle, une chèvre broute paresseusement. Pourvu que ce qu’on raconte sur l’animal est vrai…
La chèvre s’agite soudain, et quelques secondes plus tard, l’herbe s’agite et les plantes poussent à une vitesse incroyable, formant une sorte de dôme. Puis les plantes meurent et laissent apparaître la capsule d’Itération. Nyrix pose sa machette et attrape un baluchon.
La Voyageuse sort de la capsule sans regarder Nyrix, qui lui propose à manger. La Voyageuse veut savoir où est Violon, mais Nyrix prétend ne rien savoir ; la dernière fois qu’elle l’a vu, il était malade… Et pour cause, c’est elle qui l’avait empoisonné, prête à tout pour voyager dans le temps.
Où les premières trahisons surviennent
L’Ermite arrive en vue du hameau, mort de fatigue. Les chiens annoncent son arrivée et les gens le regardent d’un air mauvais. L’Ermite demande ici et là où se trouve le sorcier censé habiter le village et finit par toquer à la porte d’une maison au hasard. Avant qu’on lui ouvre, cependant, deux villageois à l’air hostile se dirigent vers lui. L’Ermite tente de les convaincre, mais sans succès [Échec du conflit simple] : ils le rouent de coup en se moquant de lui, avant de s’éloigner.
Pas découragé, l’Ermite ouvre grand la porte de la maison en appelant le sorcier à tue-tête ; mais à l’intérieur, il y a juste une femme et ses cinq enfants, qui ne comprennent pas vraiment ce qu’il se passe.
En l’absence de Violon, la Voyageuse décide que Nyrix fera une guide acceptable. Elle sort une petite capsule de sa poche, sorte de réplique miniature de sa machine temporelle, et lui propose de lui donner : en l’avalant, Nyrix retrouvera ses souvenirs. Ce sera son paiement. Nyrix fait mine d’écouter en se rapprochant lentement du module : lorsqu’elle est juste à côté, le module semble réagir à sa présence et s’ouvre pour elle ; elle monte dedans [Échec du conflit duel pour JC]. Nyrix a en réalité déjà emprunté l’un de ces modules par le passé, mais ça ne s’était pas bien fini. Au loin, d’étranges cris résonnent et se rapprochent : un Horla vient de retrouver la trace de Nyrix.
La Voyageuse défaillit devant cette trahison imprévue, les arbres tournent autour d’elle. Terrorisée, elle se rend compte qu’elle a laissé son arbalète dans le module… les conséquences de son erreur risquent d’être désastreuses.
Nyrix active le module ; il se recouvre de végétation mais avant qu’il puisse partir, une immense bête transperce la canopée et commence à arracher les plantes. Le transfert temporel est bloqué, mais Nyrix insiste et parvient à le faire atterrir [Réussite du conflit simple], sans se rendre compte que le Horla a voyagé avec elle, en partie détruit par son transfert à l’extérieur… Il commence néanmoins à se reconstituer petit à petit.
Où visions et prophéties guident nos protagonistes
Les deux gros bras revenant à la charge, l’Ermite décide de quitter le village et de se diriger au hasard dans les environs. Après une heure d’errance, il finit par arriver au pied d’une grande colline, au sommet de laquelle il aperçoit une anfractuosité : c’est forcément là qu’est le sorcier. Mais avant qu’il ait pu s’y diriger, l’Ermite voit la Voyageuse se diriger vers lui, paralysé par cette apparition. Cette dernière, sans mot dire, lui saute dessus pour l’étrangler. En le secouant, la Voyageuse lui ordonne de se mettre à genoux devant la Reine Bleue : elle sait que cette Reine fait partie des superstitions du coin. L’Ermite la regarde avec des yeux écarquillés et se prosterne [Réussite du conflit duel pour JC] ; il était persuadé que la Reine Bleue n’était qu’un conte pour enfant et se rend compte avec effroi qu’elle existe vraiment. Ce dont aucun des deux ne se doute, c’est que la Reine Bleue n’existait pas avant cela, et qu’elle est maintenant au courant de leur existence : au loin, elle se réveille et porte le visage de la Voyageuse.
L’Ermite remet ses graines à la Voyageuse : ces graines, d’après lui, ne sont que des reproductions des graines originales, une sorte de symbole porté par les adorateurs de Grégoire. Cela va être un peu plus compliqué de récupérer les vraies, et la Voyageuse ne comprend pas pourquoi on ne l’a pas envoyée voir Grégoire dès le départ… Elle fait se relever l’Ermite et lui ordonne de la guider.
Après quelques heures, la Voyageuse, fatiguée, s’arrête et s’adosse à un arbre. Elle prévient l’Ermite qu’une fois arrivés devant Grégoire, il faudra qu’il obéisse aux ordres qu’elle lui donnera, sans poser de questions. L’Ermite, se souvenant de son rêve, lui répond avec une pointe de doute ; pour s’assurer de sa loyauté, la Voyageuse lui propose l’une de ses capsules à souvenir en récompense. Alors qu’ils se remettent en route, elle voit au loin la silhouette de Thibault, un agent d’Itération, qui les suit : certainement une illusion, puisqu’il est mort depuis longtemps…
Sur son chemin dans ce territoire inconnu, Nyrix croise un groupe de réfugiés qui lui jettent des regards méfiants. Est-elle une agente de la Reine Bleue, celle qui règne sur tout Millevaux et détruit ce qu’elle ne peut posséder ? Nyrix tente de les convaincre qu’elle n’est pas au courant de tout cela, lorsque l’un des réfugiés marmonne [Échec du conflit simple] : « C’est elle, c’est Itération ! Celle qui survient quand le monde est menacé ! ». Nyrix regarde la veste qu’elle avait revêtu en sortant du module et, pour le moment, accepte cette confusion d’identité.
Où passé et futur s’entremêlent
L’Ermite est allongé sur son lit : il est très fatigué car malgré son grand âge, il continue de s’embourber dans les mêmes rêves, encore et encore. Il est tiré du sommeil par un jeune guerrier qui lui annonce qu’Itération vient d’arriver : enfin, la prophétie va s’accomplir ! Il sort et va à la rencontre de Nyrix, qu’il reconnaît très vaguement comme la figure aperçue dans ses songes… la figure qui pouvait cracher des flammes et s’opposer à la Reine Bleue. Nyrix accepte d’aller la combattre, à condition que l’Ermite lui remette l’arme rituelle qu’il a conservé pendant tout ce temps dans une petite cahute. Il s’y trouve la même arme que Nyrix avait vu dans les mains de la Voyageuse, mais avec des dizaines d’années de plus…
Nyrix réclame du repos avant de partir accomplir sa quête : l’Ermite est un peu déçu mais accepte d’organiser un grand banquet en son honneur pendant qu’elle va se décrasser. Une fois qu’elle est partie, l’Ermite caresse rêveusement l’arbalète de feu : cette femme est-elle vraiment l’élue ? Où l’a-t-il déjà vue auparavant ? Il se voit soudain, toutes ces années auparavant, lorsqu’il était en compagnie de la Voyageuse : il trébuche et se rattrape à son bras, échangeant soudain et brièvement son esprit avec celui de son incarnation passée.
Près du village de Grégoire, la Voyageuse et l’Ermite voient soudain apparaître un module, fait de bric et de broc, bien plus organique que le précédent : la Reine Bleue, une vieille femme avec les traits de la Voyageuse et le même regard perçant, en sort. Elle caresse la joue de l’Ermite : « Tu ne devrais pas penser si fort, mon petit… », puis se tourne vers la Voyageuse : « J’ai toujours voulu savoir s’il disait vrai ; ce que ça ferait… Si ce sera la fin ou un nouveau départ… ». Puis sans plus de cérémonie, elle lève la main pour tuer la Voyageuse. Cette dernière arrache le couteau d’Itération qu’elle tenait en main et avec un sourire dément, lui plante profondément dans la gorge, comprenant alors seulement que tout cela était prédit et qu’elle ne pourra rien changer de ce passé. La Reine Bleue s’effondre sur le sol et l’Ermite, dans un instant de confusion, se jette sur elle pour l’étreindre. La mousse les recouvre tous deux et l’Ermite s’extirpe juste à temps, non sans en conserver quelques plaques vertes sur la peau, comme si un transfert venait d’avoir lieu.
Nyrix se prélasse dans son bain et repense à son passé, lorsqu’elle attendait le module avec sa chèvre. Dans son souvenir, on voit soudain le Horla apparaître, se reconstituant dans différentes époques en même temps, et se tenir à la place du module. Il se dresse furieusement et attaque Nyrix, la tuant sur le coup ; malgré ce paradoxe, Nyrix n’est pas effacée dans le futur [Réussite du conflit simple]. Elle sort du bain et se traîne hors du village ; dans la forêt, les plantes la recouvrent et la protègent, le temps que la vague de paradoxe reflue. Néanmoins, l’événement a déclenché un signal de secours à Itération, qui envoie une unité de secours sur les lieux…
Au même moment, l’Ermite ressent une terrible brûlure et reçoit une partie du paradoxe, son esprit se mettant à mélanger les époques et à voyager de l’une à l’autre.
Dans le passé, des fleurs éclosent dans les cheveux de la Voyageuse, qui prend alors conscience que c’est elle, la Reine Bleue, la seule constante qui permet au temps de continuer son emprise.
Où ont lieu les derniers face à face
L’Ermite, animé par une nouvelle vigueur, agrippe soudain Nyrix : les « autres » viennent d’arriver pour la chercher, il faut qu’elle s’enfuie. Qu’elle aille se réfugier dans la grotte non loin où il viendra la chercher.
L’Ermite va ensuite à la rencontre des agents d’Itération pour faire gagner du temps à Nyrix : ils tentent de le repousser gentiment mais, comme il insiste, l’une des agentes sort une sorte de bâton orangé avec lequel elle le fait tomber au sol. La douleur est autant physique que mentale, et l’Ermite sent quelques-uns de ses souvenirs s’effacer. L’autre agent lui reproche son geste de violence inutile, ce qui permet à Nyrix de s’enfuir pendant ce temps [Réussite du conflit simple].
La Voyageuse regarde les taches vertes sur le corps de l’Ermite et lui décoche un sourire radieux : il est comme elle, à présent. En récompense, elle lui donne les capsules souvenir promises ; néanmoins l’Ermite sent confusément que la Voyageuse est agacée par la situation. Alors qu’il hésite, la Voyageuse lui met le poignard sous la gorge, et l’Ermite avale l’une des capsules pendant qu’elle lui explique qu’elles sont emplies des souvenirs qui gorgent les arbres de Millevaux ; c’est un souvenir qui ne lui appartient pas qu’il vient d’avaler. La Voyageuse est déçue qu’il n’en meurt pas, mais elle sait qu’un jour, elle le retrouvera.
Comme l’Ermite tarde à venir dans la caverne, Nyrix se concentre sur lui ; les plantes commencent à la recouvrir et lorsqu’elle les écarte, elle est de retour dans le passé, juste après la discussion entre la Reine Bleue et l’Ermite, plus jeune que dans ses souvenirs. Ce dernier se souvient confusément de leurs échanges dans le futur : Nyrix doit tuer la Reine, il n’y a plus que cela qui compte, et elle est justement dehors, tout près. C’est maintenant ou jamais.
Malheureusement, Nyrix n’a pas d’arme : mais à cet instant, un specte apparaît dans un recoin de la grotte, et lui tend son arme. « Si tu ne tues pas la Reine », lui dit l’Ermite, « la réalité s’effondrera. Et s’il faut cramer toute cette forêt pour le faire, qu’il en soit ainsi ».
La Reine Bleue sourit en voyant Nyrix approcher : ce n’est pas maintenant qu’elle meurt, elle est intouchable pour le moment puisque le temps ne peut être changé. Nyrix lui pose la main sur l’épaule, et les plantes les recouvrent toutes deux. Lorsqu’elles se retirent, la Reine Bleue a pris sa place au moment où le Horla passe à l’attaque.
Où tout recommence…
Les agents d’Itération quittent le village, l’Ermite à leur trousse ; ils les entend dire qu’ils ne sont pas à la bonne époque. Ils se dirigent vers une grotte où, selon les légendes que l’Ermite a entendu dans sa jeunesse, un sorcier vivait et de grand destins ont été liés.
L’Ermite se cache derrière un rocher et lorsque les agents sortent de la grotte, il les égorge de la pointe de son bâton avant qu’ils n’aient pu réagir. Il repousse dans un ravin le cadavre de la femme, prend le corps de l’homme et l’installe proprement dans un coin de la grotte, son arme entre les mains. Il sait confusément qu’un jour, cette arme arrivera dans d’autres mains. Puis l’Ermite s’assied en face de lui et attend : bientôt, Itération aura tué la Reine Bleue. Et si elle n’y parvient pas, ce n’est pas grave puisqu’il est sorcier et pourra user de sa magie pour que tout rentre dans l’ordre. Perdu dans ses pensées, l’Ermite se laisse submerger par les faux souvenirs de la capsule : il se revoit, plus jeune, donnant ses plantes et ses médecines artisanales aux habitants du coin… Les plaques vertes sur son corps se multiplient et il se change bientôt en mousse, disséminée sur les parois de la grotte.
Sans aucune peur, perdue dans sa folie, la Reine Bleue fait face au pouvoir du Horla. Des capsules temporelles apparaissent un peu partout autour d’eux et des agents d’Itération, armés d’arbalètes, en sortent. « Directive X activée ! » entend-elle depuis les haut-parleurs. « Époque corrompue ! Brûlez tout ! »
Elle lève l’arme de secours encore coincée dans sa combinaison et tire dans le réservoir temporel de l’une des capsules [Réussite du conflit simple]. Tout explose autour d’elle : les agents, le Horla, la Reine Bleue. Au cœur de l’explosion quantique, on voit les restes d’égrégore de la Reine Bleue s’insuffler dans le cœur des habitants de Millevaux : elle est devenue la Reine Bleue, la vraie.
Dans la déflagration, un agent d’Itération est projeté à travers le temps : il parvient à s’accrocher à l’essence du Horla et fusionne avec lui. Nyrix perçoit confusément cette fusion : la forêt lui soufflant qu’Itération doit survivre, coûte que coûte, il concentre ses nouvelles forces pour déposer une graine, dans le passé, qui mènera un jour à la création de l’agence temporelle.
Dans le passé, Nyrix ramène la chèvre à Violon ; le guide ne répondant pas, sans doute cloué au lit, elle entre chez lui et remarque que la trappe qui mène à sa cave est ouverte. Elle y jette un coup d’œil : Violon est au sous-sol, en train de mettre la dernière main à sa machine, qui fonctionne au paradoxe. Plus elle en avale, plus elle devient puissante.
Nyrix comprend alors qu’Itération n’a pas pour mission de régler les paradoxes, mais d’en créer le plus possible. Elle laisse échapper un cri ; Violon s’aperçoit de sa présence, attrape un pistolet sur un établi, et la tue.
Rideau
Les personnages
JC – La Voyageuse / La Reine Bleue
[Folie] Je veux récupérer les graines à tout prix
[Nature / Cartographie hasardeuse] J’ai fait une erreur, je suis perdue dans Millevaux
[Folie / Paranoïa] Je ne peux faire confiance à personne
[Causalité] J’ai merdé grave
[Égrégore] La Reine Bleue veut se venger
[Société] Il va falloir que je me confronte au clan de Grégoire
[Égrégore] J’ai vu le spectre de Thibault
Je me suis tuée moi-même [Ne collait pas au thème mais dramatiquement approprié]
[Itération] Itération m’a menti sur la nature du temps
[Folie / Mégalomanie] Je suis la Reine Bleue, seule garante de la cohésion temporelle
[Causalité] Un jour j’éliminerai le petit voleur
[Égrégore] Je suis devenue la Reine Bleue, la vraie
Tom – Nyrix / Itération
[Émotions / Envie] Je veux pouvoir voyager dans le temps
[Emprise / Vivres faisandées] J’ai empoisonné Violon
[Itération] Le module me reconnaît
[Égrégore / Horlas] Un Horla me poursuit [rayé]
[Relations] Je suis Itération
[Nature] J’ai été changée par la forêt
[Itération / Sauvetage] Une unité de secours d’Itération vient à ma « rescousse »
[Itération / Agent double] Mon moi passé survit et devient distinct de mon vrai moi
[Itération] Je recrée une nouvelle Itération
[Science / Machine infernale] Violon est le Créateur d’Itération
Côme – L’Ermite / Le Sorcier
[Causalité / Futur] Je veux éviter le futur funeste que j’ai vu en rêve
[Itération] Je détiens ce qu’Itération est venue chercher
[Folie / Inconscience du danger] Coûte que coûte, je retrouverai le sorcier
[Paradoxe] Nous avons créé la Reine Bleue [rayé]
[Itération] J’ai prêté allégeance à Grégoire
[Égrégore] Je suis lié à Itération par-delà les époques
[Nature] Le lien de la Reine Bleue avec la nature survit en moi
[Causalité] Je me perds dans le temps
[Folie] Ma conscience se détache malgré moi
[Nature] Je ne suis plus qu’un avec Millevaux, à tous les endroits et toutes les époques
Hors ligne